Salut Rod,
Le contraire m'aurait étonné, aussi...
L'UMP et le Modem sont deux histoires différentes. A mon avis, le Modem, et le centre en général, suit une trajectoire assez similaire à l'extrême gauche. Depuis des années, on se dit qu'ils ont un boulevard, le Modem parce qu'on sent qu'une grande partie de l'électorat est au centre, la gauche-gauche parce qu'on sent monter la révolte. Pourtant, à l'exception de quelques bons scores (2002 pour l'extrème gauche, je ne sais plus quand pour Bayrou), l'électorat ne suit pas. Et à mon avis cela tient a fait que si leurs idées pourraient attirer du monde, peu de gens se reconnaissent dans leurs leaders et leurs militants. Bayrou apparait comme une sorte de mauvais compromis entre gauche et droite, et l'extrême gauche a du mal à sortir de son image d'indécrottables râleurs, et d'ados attardés.
C'est peut être dommage, mais je crois que ça montre une réalité profonde: la politique n'est pas qu'une affaire de positionnement idéologique. Beaucoup de français sont au centre, mais le Modem n'arrive pas à incarner cette tendance, tout comme l'extrême gauche n'arrive pas à incarner la révolte qui monte.
Le cas de l'UMP me parait confirmer cette analyse. Au fond, après Sarko, et les affaires, et les guerres des chefs, on pourrait imaginer que le parti s'effondre aux élections, voire disparaisse, mais ce n'est pas le cas, et je te parie que ce sera pareil pour le PS après Hollande. Car même discrédité, l'UMP comme le PS incarnent quelque chose de plus profond, de plus général, ce qu'on surnomme habituellement droite et gauche, et dans laquelle une majorité se reconnait.
Tu dis souvent que pour toi ces distinctions n'ont pas de sens. Je crois que c'est aussi le cas de beaucoup de militants d'extrême gauche, et que c'est le fond du problème. En ne voyant pas cette différence, ils montrent juste qu'ils sont coupés du peuple.
Excuse moi, mais quelle est la différence entre ta définition "des jeunes qui n'ont pas trouvé leur place et vivent réellement leurs engagement" et la mienne "post ados en quête d'une cause"? Et surtout, je crois qu'en te focalisant sur leur sincérité, ou la variété de leurs parcours, tu passes à côté du problème : la façon dont leur engagement est perçu par le reste de la population, qui n'a pas toujours, elle non plus trouvé sa place, qui est parfois nomade, qui vit aussi ses engagements, mais qui ne se reconnait pas dans l'expression de sa révolte via la défense d'une zone humide, ou d'une zone de culture maraîchères, ou dans des slogans à la con comme 'all cops are bastards' (et pourquoi en anglais, d'abord?).
Je me disais bien que ça devait être de la faute de la bourgeoisie et des conservateurs, aussi... Et c'est amusant, cette apparition du "vous" ou du "tu" dans tes posts quand on met en cause le bien fondé des causes que tu défends. Tu ne crois pas que la peur panique de la dissonance cognitive est un peu de ton côté là, peut être parce que tu te rends compte, confusément, que ton noyau dur nomade ressemble beaucoup aux punk à chiens d'autrefois, aux baba cools d'avant, aux traine savate d'encore avant, bref, à ces catégories marginalisées, qui ont toujours existé, se sont toujours prétendues d'avant-garde, mais n'ont jamais eu d'impact réel sur la société? (c'est le sens du mot "marginal")
Enfin, bon, on verra... Mais je ne retiens pas mon souffle.
Croire que ses problèmes sont nouveaux, c'est presque une définition de la jeunesse...
Je crois que ce qui est nouveau, c'est le décalage entre les attentes nées de la société de consommation (dont ces jeunes sont de purs produits même s'ils la rejettent), et la réalité de la vie adulte. Dans le passé, on se colletait assez tôt au réel. Aujourd'hui, on peut rester assez longtemps dans ce monde magique et protecteur de l'enfance, où tout est pris en charge, où personne ne nous juge, où l'on a beaucoup de droits et peu de responsabilités, où l'on ne risque pas grand chose et où tout le monde nous écoute poliment, et ne nous décourage pas quand on répète que "nous sommes l'avenir".
Autrefois, la sortie s'appelait la crise d'adolescence (et ce n'est pas propre à notre société occidentale, toutes les sociétés matérialisent ce moment). Aujourd'hui, cela arrive plus tard, alors qu'on a eu davantage le temps de rêver et de croire, et donc c'est plus violent, d'autant plus que le monde de l'enfance est beaucoup plus protecteur qu'autrefois. Du coup c'est un peu brutal, et ça se voit dans le choix de leurs causes, qui sont parfois difficiles à comprendre.
Et ces jeunes désaxés (misfits en anglais) ont toujours été la chair à canon idéale des idéologues de tout poil. C'est le matériau dont on fait les martyrs, les gardes rouges, les djihadistes, les victimes innocentes de la barbarie et les bras armés de la dictature.
Bref, plus ça change...
Francois
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