Mais est-ce le cas ici? Je te citais l'exemple des instituteurs, et d'une large partie de la fonction publique (la justice, les territoriaux). Il n'y a pas là de méchant capitaliste à bretelles, haute forme et cigare, qui se goinfre de dividendes, juste un état employeur, qui se dit qu'à tout prendre, une mère de famille issu d'un milieu éduqué, pas trop exigeante sur le salaire (vu que c'est un revenu d'appoint), est plus agréable à recruter qu'une personne issue d'un milieu plus modeste, qui présente moins bien, avec plus de problèmes sociaux à la clef. Et que si, en plus, elle habite dans la commune (et a les moyens pour le faire), elle saura montrer sa reconnaissance électorale, et aura moins de problèmes de transport...
Le capitalisme n'est pas en cause. On avait le même genre de situation dans les républiques socialistes, où les citoyens les plus favorisés par le régime plaçaient leurs proches dans des postes confortables.
Et note aussi que, dans un système capitaliste comme le nôtre, où l'Etat "pèse" plus de 50% de l'économie, les pouvoirs publics auraient les moyens de corriger ces dysfonctionnements, s'ils le souhaitaient. Mais les hauts fonctionnaires qui nous dirigent appartiennent à ces classes favorisées, et n'ont aucun intérêt à le faire évoluer. Et les partis de gauche, qui devraient s'insurger contre cette injustice semblent ce méfier de cette nouvelle lutte des classes, dont les opprimés votent si mal (je me permet de te rappeller, une fois de plus, la remarque de Marx sur le lumpen-proletariat)...
Donc oui, la question est bien "quelle société veut on?", et je crois que la réponse est de plus en plus claire, hélas. On veut une société qui se paie de mots, qui préfère les grandes phrases et les concepts flous (l'esprit du 11 septembre, le vivre ensemble, et toutes ces choses qu'on réinvente et qu'on revisite) à la réalité, et qui prétend ignorer les problèmes et les repoussant toujours plus loin. C'est ainsi qu'on chasse les pauvres de plus en plus loin des centre ville, pour ne pas avoir à les regarder, qu'on essaie tant bien que mal de se convaincre qu'on "fait ce qu'il faut", en payant des impôts et en distribuant des aides sociales, et qu'on laisse aux générations futures, via la dette ou les grandes déclarations sur l'environnement, le soin de régler (ou de reporter à leur tour) les questions qu'on ne veut pas résoudre.
Le capitalisme moderne n'est pas la cause, Rod, c'est tout au plus l'effet. Le problème, c'est la grande lâcheté contemporaine, prête à tout sacrifier pour un peu de confort supplémentaire, qui se gave de formules ronflantes, et met au pouvoir les politiciens les plus apaisants...
Francois
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