Le succès de l’iPhone fait entrer le jeu vidéo pour mobiles dans une ère nouvelle
LE MONDE | 17.04.09 | 10h31
in avril,le jeu Assassin's Creed, l'un des plus gros succès récents du français Ubisoft pour les consoles et PC, au scénario et aux décors très soignés, débarquera au prix de 7,99euros sur le magasin en ligne de l'iPhone, le téléphone d'Apple. Les équipes de Gameloft, la société qui "porte" le jeu pour ce terminal, n'attendent plus que le feu vert du comité de sélection d'Apple, une simple formalité selon eux.
Le jeu sortira dans une version allégée, adaptée aux contraintes du mobile (un écran de 7,5cm sur 5) mais avec une qualité graphique bien supérieure à celle des "casse-briques" un peu primaires qui, il y a encore quelques mois, constituaient l'essentiel de l'offre sur les téléphones. De l'avis des spécialistes, l'iPhone et son AppStore, lancé à l'été 2008, font entrer le jeu pour mobiles dans une nouvelle ère.
L'offre de jeux est désormais pléthorique : selon Apple, un quart des 25000applications gratuites ou payantes de l'iPhone sont des jeux. Car la société californienne a su convaincre la plupart des éditeurs de travailler pour sa plate-forme, "en leur proposant un canal de distribution très puissant", selon Laurent Geffroy, du cabinet Greenwich Consulting. Il suffit de deux clics aux détenteurs d'un iPhone pour accéder aux jeux alors que, jusqu'à présent, ils devaient d'abord accéder au portail wap de l'éditeur ou d'un opérateur partenaire.
Les éditeurs ont aussi été attirés par le nombre de joueurs potentiels (30millions d'iPhone et de baladeurs iPod Touch vendus). Pour espérer en toucher autant d'un coup, les éditeurs devaient jusqu'à présent "porter" chaque jeu sur plusieurs dizaines de téléphones différents. Chez Gameloft, deuxième éditeur spécialisé sur les mobiles derrière l'américain Electronic Arts, 70% des 4000salariés (chinois et roumains essentiellement) ne travaillent qu'à cela… Apple propose, en outre, un partage des revenus attractif : il ne conserve que 30% du prix de vente du jeu, contre 70% pour l'éditeur.
Enfin, les caractéristiques techniques de l'iPhone stimulent la créativité des éditeurs.
Leurs troupes codent en langage C++, rendant possible des jeux plus riches qu'avec Java, jusqu'alors utilisé pour les mobiles. La présence d'un détecteur d'inclinaison, transformant le téléphone en une pédale de frein ou d'accélération dans le cas des courses de voitures, permet de créer des titres très innovants, comme le jeu d'empilement Topple.
Du coup, le nombre de joueurs sur mobiles décolle. Selon l'institut Comscore, 18,6% des propriétaires d'iPhone ont téléchargé un jeu payant en janvier au Royaume-Uni, contre 2,7% pour un propriétaire de mobile normal. La multiplication des forfaits de téléphonie avec l'Internet illimité explique aussi cette progression des usages. Cela se voit dans le chiffre d'affaires des éditeurs: en six mois, grâce à l'iPhone, Gameloft a réalisé 5millions d'euros avec 21jeux, selon une étude de la société Aurel. Plus impressionnant : le jeu de kart Crash Bandicoot Nitro Kart, téléchargé environ 1million de fois sur l'AppStore, aurait rapporté, à lui seul, environ 4millions d'euros, dont 2,8millions à Vivendi Games Mobile, son éditeur.
Le modèle de l'AppStore est en train d'être dupliqué par d'autres constructeurs (Nokia, RIM, le fabricant du Blackberry, etc.). Par ailleurs, beaucoup de fans d'Apple attendent une baisse du prix de l'iPhone. Ce qui pourrait encore accélérer la croissance du marché du jeu sur mobiles. Du coup, une concurrence frontale entre le téléphone et les consoles portables (la DS de Nintendo et la PSP de Sony) paraît probable. "L'expérience de jeu est comparable", selon un développeur de Gameloft. Sans compter que les jeux sur téléphone sont nettement moins chers que sur les consoles portables…
Cécile Ducourtieux
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