Je ne crois pas que ça marchera mieux dans l'autre sens... Mon impression, c'est que dans ce genre de système on va avoir trois sortes d'effets pervers (suivant la taille et l'organisation capitalistique des entreprises).
Dans des grands groupes, ce seront les filiales qui récupèreront les aides, et remonteront la trésorerie vers les holding, sous forme de "charges de gestion" etc... Du coup, les filiales ne versent jamais de dividendes, ni d'intéressement d'ailleurs, les salariés vont te bénir!
Dans des petites structures, ça va encourager des systèmes de yoyo : en gros, je prends des aides plusieurs années, que j'affecte aux réserves (sous couvert d'investissement), et je distribue un gros paquet de temps en temps.
Dans des TPE, cela ne fera que renforcer la tendance actuelle : à force de taxer les dividendes, il est devenu plus intéressant de se rémunérer en salaire (ou en frais) qu'en bénéfices. Du coup, les entreprises ont tendance à "tout manger", ce qui les fragilise à terme.
Bref, je ne vois guère que des inconvénients, même si je suis d'accord que c'est le genre d'idée qui semblera parfaitement évidente à nos braves énarques qui n'ont jamais vu une entreprise.
Sur le financement du capital, je crois que c'est toute la perversité du "marxisme pour les truffes" qui est devenu la théorie économique de nos gauchistes contemporains (avec la caution scientifique de notre brave Piketty), et qui veut que la séparation entre travail (bien) et capital (mal) soit claire, un peu comme s'il y avait, dans chaque entreprise deux livres de comptes : un pour le capital et un pour le travail. La réalité est malheureusement plus complexe, parce que dans l'entreprise capital et travail sont salement mélangés, et difficilement séparables.
En gros, les aides ou les baisses de charges ne servent NI à payer les (méchants) actionnaires, NI à embaucher des (gentils) salariés, mais à reconstituer des marges, qui en période de crise vont aller aux réserves, payer des dettes, voire assainir la situation générale (ce qui peut, soit dit en passant, passer par des licenciements, il n'y a pas de lien direct). Ceci doit permettre à des entreprises de redevenir saines, et de se remettre à croître, en embauchant et en attirant des capitaux (qui viendront parce qu'on les rémunère). A terme, et en moyenne, les aides créent de l'investissement, et donc de la croissance et de l'emploi, mais cela peut prendre du temps, et surtout, cela ne suit pas un processus déterministe qu'on pourrait suivre entreprise par entreprise.
Dans ce contexte, la théorie du "donnant-donnant" qui fait tant rêver nos politiques et nos journalistes : je te donne de l'argent que tu réinvestis tout de suite, c'est un doux rêve de bureaucrates qui croient que l'entreprise est une sorte de "serious game", où les causes ont des effets immédiats, qui se mettent facilement en équations, et où l'on peut appuyer sur un bouton "accélérer" quand ça n'avance pas assez vite.
Et c'est bien là que je suis d'accord avec toi. Les aides de l'Etat à l'économie, ça marche quand on a au gouvernement des gens qui comprennent quelque chose à l'entreprise. Là, on n'en a pas, donc il vaudrait mieux s'abstenir.
Francois
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