La Cour suprême voudrait permettre au FBI de pirater des dispositifs dans le cadre d'une enquête
une décision qui pourra prendre effet dès décembre
La Cour suprême a approuvé ce jeudi un amendement proposé sur la procédure pénale qui pourrait permettre aux juges américains de délivrer des mandats de perquisition pour avoir accès à des ordinateurs et dispositifs dans n’importe quelle juridiction aux États-Unis. Ces modifications prendront effet en décembre, à moins que le Congrès ne décide d’adopter ou de rejeter cet amendement.
Les règles actuelles prévoient que les juges ne puissent délivrer des mandats que dans leur juridiction, dans une juridiction voisine, voire dans quelques districts bien définis. Aussi, un juge ne pouvait approuver un mandat pour fouiller à distance un ordinateur ou un dispositif si l’enquêteur ne savait pas où il se trouve (parce qu’il pouvait se trouver hors de sa juridiction).
Mais le département de la Justice a avancé que ce changement est nécessaire pour garder le rythme face à des criminels qui opèrent parfois dans plusieurs juridictions (ou plusieurs pays). « Cet amendement permet que les tribunaux puissent être invités à examiner les demandes de mandat dans des situations où il est difficile de savoir quel juge en a le pouvoir. L'amendement rend explicite qu'il ne modifie pas les règles traditionnelles régissant la cause probable et l'avis », a expliqué Peter Carr, un porte-parole du département de la Justice.
Cet amendement va autoriser le FBI à se servir des techniques d’investigation du réseau (network investigative techniques, NITs) pour fouiller à distance des ordinateurs situés dans n’importe quelle juridiction.
L’amendement a déjà provoqué une vague d’indignation chez les défenseurs de la vie privée qui suive le sujet avec intérêt. « Peu importe l’euphémisme employé par le FBI pour décrire cet amendement, qu’il appelle une “recherche à distance” ou une ”technique d’investigation du réseau”, ce dont nous parlons est le piratage effectué par le gouvernement, et cette modification obscure de la réglementation en vigueur va en autoriser encore plus », a regretté Kevin Bankston, directeur de la Open Technology Institute.
Ahmed Ghappour, un professeur de passage à l’université de California Hastings Law School, a décrit cette mesure pour sa part comme étant « une possibilité d’expansion plus large du pouvoir de surveillance extraterritorial depuis la création du FBI ».
L’amendement permet également au FBI de pirater des ordinateurs qui ont déjà été piratés, par exemple ceux qui ont été infectés par un botnet.
« En raison de leur nature distribuée, les enquêtes lancées suite à des botnets illégaux posent sans aucun doute un obstacle important à l'application de la loi », a estimé Amie Stepanovich, senior policy counsel pour le compte du groupe de défense des droits numériques Access Now. De plus, « l'amendement proposé étend de façon unilatérale les investigations pour encapsuler davantage les dispositifs des victimes elles-mêmes qui ont déjà subi un préjudice et sont le plus exposées à une utilisation ultérieure du botnet ».
Pour le sénateur Ron Wyden, « ces amendements auront des conséquences importantes pour la vie privée des Américains ainsi que l'étendue des pouvoirs du gouvernement pour assurer la surveillance et les fouilles à distance des appareils électroniques ». « Je prévois d'introduire une législation pour inverser ces modifications sous peu, et de demander des détails sur ce processus opaque d'autorisation et d'utilisation de techniques de piratage par le gouvernement ».
Source : amendements soumis au Congrès (au format PDF), Amie Stepanovich (Access Now), Ahmed Ghappour
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