Le projet de loi de Myriam El Khomri prévoit que les Français puissent travailler plus,
il sera présenté en conseil des ministres le 9 mars
Mise à jour du 29 / 02 / 2016 :La présentation du projet de loi de Myriam El Khomri a été reportée de deux semaines
Suite à à la demande formulée dimanche dernier par le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, qui a appelé le gouvernement à « reporter » le projet de loi El Khomri pour « repartir sur une concertation », Manuel Valls a déclaré « qu'il faut lever un certain nombre d'incompréhensions, il faut expliquer, répondre à toute une série de fausses informations qui sont données sur ce texte. Donc, nous allons nous donner quelques jours supplémentaires avant le passage en Conseil des ministres, une quinzaine de jours sans doute, ce qui ne change pas grand-chose par rapport au calendrier parlementaire initial qui était prévu ». Le Premier ministre a par ailleurs indiqué qu'il va consulter séparément l'ensemble des partenaires sociaux, syndicats et organisations patronales.
En clair, le texte, qui devait initialement être présenté le 9 mars en Conseil des ministres, le sera au final le jeudi 24 mars, puis soumis à l’Assemblée nationale et au Sénat, « pour une adoption définitive, comme prévu, avant la suspension estivale des travaux parlementaires ».
Le cofondateur du Parti de gauche Jean-Luc Mélenchon a déclaré pour sa part « nous avons obtenu le report du projet de loi Travail, nous allons maintenant nous battre dans la concertation pour obtenir un rééquilibrage du texte, a réagi Laurent Berger sur son compte Twitter. Il faut retirer le plafonnement des indemnités prud'homales, le pouvoir unilatéral de l'employeur et revoir le cadre des licenciements économiques ».
Source : YouTube, Tweet Jean-Luc Mélenchon
Si pour l'instant il n'est encore qu'un document de travail sur « l’avenir de la négociation collective, du travail et de l’emploi », voici quelques axes du texte que Le Parisien est parvenu à se procurer.
Tout d'abord, la durée légale du travail reste de 35 heures, autrement dit, le texte prévoit que « toute heure accomplie au-delà de la durée légale hebdomadaire ou de la durée équivalente est une heure supplémentaire qui ouvre droit à une majoration salariale, ou le cas échéant, à un repos compensateur équivalent ». Dans les entreprises dont la durée collective hebdomadaire de travail est supérieure à la durée légale hebdomadaire, la rémunération mensuelle due au salarié peut être calculée en multipliant la rémunération horaire par les 52/12 de cette durée hebdomadaire de travail, en tenant compte des majorations de salaire correspondant aux heures supplémentaires accomplies.
Si la durée légale du travail n'a pas été modifiée, en revanche la durée maximale quant à elle passe à 46 heures par semaine (contre 44 heures auparavant) et ce pendant 16 semaines consécutives (contre 12 semaines auparavant) dans l'Art. L.3121-22. Le texte prévoit également « qu'en cas de circonstances exceptionnelles, une convention ou un accord d’entreprise ou d’établissement, ou, à défaut, un accord de branche peut prévoir le dépassement de la durée maximale hebdomadaire de travail de quarante-huit heures, à condition que ce dépassement n'ait pas pour effet de porter cette durée à plus de soixante heures ».
Une période d'astreinte s'entend comme une période pendant laquelle le salarié, sans être sur son lieu de travail et sans être à la disposition permanente et immédiate de l'employeur, doit être en mesure d'intervenir pour accomplir un travail au service de l'entreprise. Le texte estime que « la durée de cette intervention est considérée comme un temps de travail effectif » et par conséquent « la période d’astreinte fait l’objet d’une contrepartie, soit sous forme financière, soit sous forme de repos ». « Exception faite de la durée d’intervention, la période d’astreinte est prise en compte pour le calcul de la durée minimale de repos quotidien prévue à l'article L. 3131-1 et des durées de repos hebdomadaire prévues aux articles L. 3132-2 et L. 3164-2 ». En clair, si pendant cette période d'astreinte l'entreprise n'a pas fait appel aux services de son employé, il sera considéré comme temps de repos et ne sera donc pas pris en compte dans le calcul de la durée maximale de travail.
Le temps de travail des apprentis de moins de 18 ans passe de 8 heures maximum à 10 aujourd'hui : « à titre exceptionnel ou lorsque des raisons objectives le justifient, l’apprenti de moins de dix-huit ans peut effectuer une durée de travail quotidienne supérieure à huit heures, sans que cette durée puisse excéder dix heures ». L'article prévoit aussi « qu'il peut également effectuer une durée hebdomadaire de travail supérieure à trente-cinq heures, sans que cette durée puisse excéder quarante heures ». Pour ces deux cas de figure, l'employeur n'aura plus besoin de demander l’autorisation de l’Inspection du travail et du médecin du travail, il suffira qu'il les tienne informés.
Les indemnités de licenciement sont désormais plafonnées :
- si l’ancienneté du salarié dans l’entreprise est inférieure à deux ans : trois mois de salaire ;
- si l’ancienneté du salarié dans l’entreprise est d’au moins deux ans et de moins de cinq ans : six mois de salaire ;
- si l’ancienneté du salarié dans l’entreprise est d’au moins cinq ans et de moins de dix ans : neuf mois de salaire ;
- si l’ancienneté du salarié dans l’entreprise est d’au moins dix ans et de moins de vingt ans : douze mois de salaire ;
- si l’ancienneté du salarié dans l’entreprise est d’au moins vingt ans : quinze mois de salaire.
« Que vous ayez travaillé 20 ans ou 30 ans pour une entreprise, si votre contrat de travail est rompu, ce sera 15 mois de salaire d’indemnités. Et pas un de plus », se désole Eric Rocheblave, avocat spécialiste du droit du travail, interrogé par Le Parisien.
Entrés en vigueur en 2013, les accords de maintien dans l'emploi permettent de diminuer le temps de travail d'un employé (et par conséquent son salaire), augmenter son temps de travail sans accroître son salaire ou encore de prévoir une nouvelle répartition de ses horaires de travail. Pour le moment, seules les entreprises rencontrant des difficultés peuvent y avoir recours et signer de tels accords avec les syndicats. Il faut préciser que de tels accords sont limités dans le temps (deux ans au maximum). La nouvelle disposition prévoit que l'entreprise puisse y faire recours dans la mesure où l'accord est conclu « en vue de la préservation ou du développement de l’emploi ». Si un ou plusieurs salariés refusent une modification de leur contrat de travail résultant de l’application de l’accord, l’employeur peut engager une procédure de licenciement. Le texte précise que « dans ce cas, leur licenciement ne constitue pas un licenciement pour motif économique et repose sur une cause réelle et sérieuse. Il est soumis aux dispositions relatives à la rupture du contrat de travail pour motif personnel ».
Il faut préciser qu'il ne s'agit pas là de la dernière version de l'avant-projet de loi El Khomri sur l'emploi : quelques ajustements pourront encore être apportés avant l'envoi du document définitif au Conseil d'État, d'ici à la fin de cette semaine.
Source : Le Parisien (document PDF)
Voir aussi : Le forum droit du travail
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