Dans les années 1960, Tintin au Congo connaît le même destin que Tintin au pays des Soviets : il est introuvable en librairie, les stocks étant épuisés. Les éditions Casterman n'ont en effet pas réédité l'album, car elles s'inquiètent d'une potentielle indignation de la part d'intellectuels occidentaux pro-africains, d'autant plus dans le contexte de la décolonisation de l'Afrique et de l'indépendance du Congo — la réaction des Africains est moins à craindre finalement, Tintin jouissant d'une excellente popularité sur le continent noir. Hergé avait accepté cette décision à contre-cœur, d'autant plus que 800 000 exemplaires s'étaient vendus depuis 1946. L'embarras des éditions Casterman est tel qu'elles retirent la vignette de l'album de la quatrième de couverture des Bijoux de la Castafiore, en 1963. Surpris, Hergé invite son éditeur à corriger cette erreur et à réimprimer sans attendre Tintin au Congo partout dans le monde, sauf en Afrique pour ne pas contrarier les Africains — et pourtant l'album avait déjà été réédité par une maison d'édition rwandaise dans une version en swahili, distribué à 10 000 exemplaires.
La situation reste bloquée jusqu'à la fin des années 1960, quand Hergé somme son éditeur de republier Tintin au Congo, d'autant plus que les éditions Rencontre l'ont contacté à ce sujet. Casterman accède rapidement à sa requête et procède à quelques corrections, par exemple le remplacement de « nègre » par « noir » dans les textes. L'album est à nouveau disponible en mai 1970 dans sa version en couleurs, tandis que celle en noir et blanc est rééditée trois ans plus tard au sein des Archives Hergé. Cette longue période d'hésitations est la conséquence d'attaques contre l'œuvre d'Hergé depuis plusieurs années
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