Microsoft 365 introduit un score de productivité des employés de l’ère du tout numérique imposée par le coronavirus
L’outil en disponibilité générale est controversé comme ceux d’autres éditeurs
En cette période de pandémie de coronavirus qui a commencé par forcer la plus grosse expérience de travail à domicile en Chine, le télétravail s’est étendu à l’échelle globale. Dans le processus, les employeurs recherchent des moyens de garder la main sur la productivité des travailleurs, de la contrôler, de la stimuler. Microsoft introduit donc un score de productivité des employés au sein de Microsoft 365 pour apporter réponse à ce besoin. L’outil fait l’objet de controverses comme ceux d’autres éditeurs.
Le score de productivité des employés au sein de Microsoft 365 est passé en disponibilité générale il y a peu. L’accès à ce dernier se fait au travers du centre d’administration. L’outil se base sur deux grandes familles d’indicateurs : l’utilisation de la suite bureautique cloud et celle des technologies sous-jacentes. La partie « expérience employé » qui concerne l’utilisation de la suite bureautique se divise en cinq axes : collaboration, communication, réunions, travail d’équipe, mobilité. La partie technologique en comporte trois : terminaux, réseaux, état du parc applicatif. Tous ont le même poids au sein du nouvel outil de suivi des performances des employés. Microsoft note chaque axe sur 100 points. Les logiciels pris en compte sont les suivants : Excel, Exchange, OneDrive, OneNote, Outlook, PowerPoint, SharePoint, Skype, Teams, Word et Yammer. L’accès au score requiert au minimum un abonnement Microsoft 365 Business ou Office 365 Entreprise.
Avant la disponibilité générale de ce score de productivité des employés au sein de Microsoft 365, des employeurs s’appuyaient déjà sur des solutions comme Sneek. C’est un outil de travail collaboratif qui permet aux employeurs de photographier leurs employés toutes les 5 minutes via un service vidéo en continu. L'interface du logiciel permet à l'employeur de disposer d'un "mur de visages" (pour chaque bureau), qui reste actif tout au long de la journée de travail et présente des photos des travailleurs prises par leur ordinateur portable toutes les une à cinq minutes. En fait, ce qu’il faut dire est que l’application permet aux employés de régler leur webcam pour qu’elle les photographie de façon automatique toutes les une à cinq minutes, selon la fréquence à laquelle leur patron l’exige. En sus, l’employeur peut initier un appel vidéo en direct avec un travailleur en cliquant sur sa photo, ce, même si ce dernier n’a pas accepté. C’est un paramètre par défaut du logiciel qui peut être modifié pour conditionner la réception de l’appel à une action manuelle, à condition que cela fasse partie des règles que l’employeur approuve.
D’autres aux noms encore plus évocateurs quant aux possibilités qu’ils offrent ont également fait l’objet d’acquisition par les patrons. ActivTrak, un logiciel de suivi de la productivité, est l’un de ceux-ci. Il recueille des données sur la fréquentation des sites web par un employé ainsi que sur les autres applications dont ce dernier fait usage. En s’appuyant sur le soft, l’employeur a aussi la possibilité d’avoir un aperçu du comportement en temps réel du travailleur.
En fait, la liste est plus longue et inclut des outils comme Interguard, Time Doctor, Teramind, VeriClock, innerActiv ou encore Hubstaff.
« C’est comme avoir une caméra de surveillance qui pointe en permanence sur l’ordinateur d’un travailleur », explique l’éditeur d’Interguard à propos de son produit. L’éditeur de la solution Time Doctor lui emboîte le pas dans une publication parue sur son site web en reconnaissant le côté intrusif de ces solutions. « Nous ne sommes pas aussi big brotherish que nos concurrents », précise-t-il.
Au-delà de la question liée à la vie privée des travailleurs (toutes ces solutions sont assimilables à un œil constamment ouvert sur le domicile d’un tiers), la question de fond est de savoir si la surveillance active peut permettre de mesurer la productivité d’un travailleur. En passant en revue les fonctionnalités que ces outils mettent à la disposition des utilisateurs, un début de réponse est possible.
En effet, appliquée à la situation d’un développeur en mode télétravail, la solution Time Doctor a mis en avant le fait qu’il y a des jours où ce dernier reste productif près de 15 h.
En sus, elle a révélé que cet employé s’est penché sur une tâche qui lui a pris près de 54 heures en 5 jours, soit un peu plus de 10 heures par jour.
Ce sont des chiffres à éclairer à la lumière de statistiques sur la productivité sur une journée de travail. Dans une publication parue il y a 3 ans, Invitation Digital Ltd – une firme de marketing basée au Royaume-Uni – apporte des éléments. Son étude a porté sur près de 2000 (1989 pour être exact) employés de bureau (à temps plein) âgés de plus de 18 ans et disséminés sur l’ensemble du territoire du Royaume-Uni. En réponse à la question de savoir s’ils se considèrent productifs tout au long d’une journée de travail, la grande majorité (soit 79 %) avait répondu non. D’après les résultats de l’étude, seul le cinquième (donc les 21 % restants) a répondu par l’affirmative. Le sondage avait ensuite révélé que la durée moyenne de productivité sur le lieu de service est de 2 h 53 min, soit moins de 3 h.
D’après l’enquête, si les travailleurs se retrouvaient avec moins de 3 h de productivité sur une journée de travail c’est parce qu’ils étaient la plupart du temps distraits par des activités comme : surfer sur les réseaux sociaux – 47 % (des répondants au sondage) ; lire les sites Web d'actualités – 45 % ; discuter des activités en dehors du travail avec des collègues – 38 % ; préparation de boissons chaudes – 31 % ; pauses cigarette – 28 % ; messagerie texte et messagerie instantanée – 27 % ; manger par petits bouts – 25 % ; faire de la nourriture au bureau – 24 % ; téléphoner à son partenaire/à ses amis – 24 % ; recherche d'un nouvel emploi – 19 %. Bref, un ensemble de facteurs aisément applicables à la situation de tiers en télétravail.
Le problème avec la métrique employée dans le cas du travailleur de la filière programmation informatique dont on a fait mention est que malgré des chiffres élevés (productivité sur 15 h par jour, etc.), le retour de l’employeur n’était pas positif. Autrement dit, le travail n’était pas effectué, ce qui pose le problème de la pertinence des éléments de mesure utilisés. Néanmoins, des fonctionnalités additionnelles de l’outil Time Doctor ont révélé qu’il se servait d’une application pour simuler une activité de la souris.
Source : Microsoft
Et vous ?
Que pensez-vous de l’utilisation de tels moyens pour juger de la productivité d’un développeur ?
Y a-t-il une certaine pertinence pour les employeurs à faire usage de tels outils ?
Selon vous, sur quels critères doit-on s’appuyer pour juger de la productivité d’un travailleur de la filière programmation informatique en particulier ?
Accepteriez-vous de travailler en étant surveillé de façon aussi active ?
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