J'avais réagi il y a quelques temps sur ce post à une phrase où l'auteur affirmait que l'Europe nous avait protégé. J'avais cité des éléments indiquant que le bilan était vraisemblablement plutôt négatif. J'aimerais revenir brièvement sur l'euro en particulier.
Dans la mesure où la BCE conduit une politique ciblée sur la lutte contre l'inflation et adaptée à la zone euro dans son ensemble, il existe toute une série de débats quant aux conséquences économiques dans la mesure où nous ne formons a priori pas une zone monétaire optimale. Chaque pays se voit en effet pénalisé de différentes façons : lutte contre l'inflation et les bulles spéculatives insuffisantes dans les pays à forte croissance, et déficit de croissance dans les autres, comme pour la France par exemple. Le consensus général est que ces effets sont bien réels et dommageables à court terme mais que, à long terme, des mécanismes compensateurs se mettent en place.
Simplement le court terme semble durer depuis plus de dix ans du fait de l'appréciation perpétuelle de l'euro (voir ce graphique) et il est intéressant de mesurer le coût pour la France jusque là. Bien malin qui pourra dire quel a été notre déficit de croissance du fait de l'euro mais une estimation de 0,5 point par an ne semble pas déraisonnable. Après treize ans donc (gel des taux de changes en 1999), notre PIB devrait être 7% plus élevé (1.005^13) et notre taux de chômage de 3.5 points plus faible (loi d'Okun). Durant cette période, ce déficit de croissance aurait représenté un manque à gagner équivalent à 46 points de PIB (0,5% la première année + environ 1% la seconde année, etc... somme géométrique, voir Euclide), soit pour l'Etat environ 23 points de PIB de recettes cumulées en moins ! De quoi tordre le coup à l'endettement quand bien même la France serait restée sur un mode de financement par les marchés plutôt que de faire tourner la presse à billets. Et on peut souligner qu'a contrario une politique monétaire jouant la dévaluation aurait eu des effets positifs pour la France, tant économiques (dégonflement naturel de la dette de l'Etat et des ménages, rétroactions liées à une balance commerciale excédentaire, capacités d'investissement, etc) que sociaux (avantage aux salariés, chômage réduit) alors que ses effets négatifs ne sont pas si évidents (peu importe le prix des textiles quand l'immobilier flambe du fait d'un surcroît de capital bien qu'il ne faille pas sous-estimer l'impact des ressources fossiles nécessairement importées sur l'économie).
Nous attendons donc maintenant les mécanismes compensateurs... Qui pourraient bien ne pas se mettre en place. D'abord parce qu'il n'est pas dit que l'euro a terminé sa folle course, ensuite parce que si certains ménages ont bien gagné en pouvoir d'achat il est douteux que cela va relancer l'économie (éponge de l'immobilier, investissements à l'étranger, etc), puis parce qu'avec son endettement actuel l'Etat va réduire sa surface et obérer le pouvoir d'achat, enfin parce les banques sont fragiles et que le capital préfère aller là où la croissance est plus forte. Bref, les rétroactions positives sont plus faibles qu'espérées et un cercle vicieux s'est au contraire installé.
@B. AF
Désolé de ne pas t'avoir répondu. Ma paresse fut plus grande que mon désaccord.
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