La Quadrature du Net appelle Mahjoubi et Villani à prendre publiquement position,
sur le chiffrement de bout en bout
Durant sa campagne présidentielle, Emmanuel Macron avait pointé du doigt un obstacle au bon déroulement des enquêtes des forces de l’ordre : le chiffrement. « L’Internet est aussi, comme instrument opérationnel direct, un élément essentiel et les organisations qui nous menacent, abusent des facilités offertes par la cryptologie moderne pour dissimuler leurs projets. Ils utilisent des messageries instantanées, fortement cryptées pour prendre des contacts, donner des ordres et une grande partie de ce trafic Internet, parce qu’il est crypté, échappe ainsi aux services de sécurité. Ce qui est naturellement un élément de faiblesse et réduit l’efficacité de la lutte contre le terrorisme. Jusqu’à présent, les grands groupes de l’Internet ont refusé de communiquer leur clé de chiffrement ou de donner accès aux contenus, au motif qu’ils ont garanti contractuellement à leurs clients que leurs communications étaient protégées. Cette situation n’est plus acceptable », avait-il déclaré.
Un discours qui avait soulevé tellement de critiques que son équipe de campagne a été obligée de sortir un communiqué de rétropédalage et d’affirmer qu’il n’était pas question de « porter atteinte aux principes de fonctionnement des méthodes de communication moderne basées sur le chiffrement ».
D’ailleurs, son futur secrétaire d'État au numérique, Mounir Mahjoubi (qui s'était résolument engagé en faveur d'un chiffrement fort lorsqu'il présidait encore le CNNum) s'était alors empressé de tenter de rassurer experts et citoyens : « Afin de lever toute ambiguïté, dans le cas des informations chiffrées par le prestataire lui-même, nous souhaitons préciser que la proposition ne consiste pas à obtenir la communication des clés de chiffrement utilisées par les prestataires de service numérique, mais d’accéder aux contenus préalablement déchiffrés par eux-mêmes », avait-il affirmé.
Néanmoins, une fois élu, lors d'une déclaration commune avec son homologue britannique Theresa May en juin, il a annoncé encore vouloir « améliorer les moyens d’accès aux contenus cryptés, dans des conditions qui préservent la confidentialité des correspondances, afin que ces messageries ne puissent pas être l’outil des terroristes ou des criminels », sans être plus précis.
De plus, le mois dernier, le Parlement européen a introduit une nouvelle obligation dans le règlement ePrivacy : tout prestataire de communications doit, quand il le peut, protéger les messages qu'il achemine par un chiffrement de bout en bout. Cependant, pour les convaincre de ne pas adopter cette obligation, le gouvernement français avait envoyé aux eurodéputés français une lettre publiée par la Quadrature du Net. Il s'est opposé frontalement au chiffrement de bout en bout, exigeant que les prestataires de services puissent avoir accès au contenu des communications (et, par eux, que la police et les services français y aient aussi accès).
C’est dans ce contexte que la Quadrature du Net lance un appel au gouvernement, en s’adressant à Mounir Mahjoubi, secrétaire d’État au numérique, mais aussi à la représentation nationale, à travers une requête adressée au député Cédric Villani :
« MM. Mahjoubi et Villani ont, par le passé, avant d'être aux affaires, chacun pris des positions utiles et puissantes sur le chiffrement. L'un en tant que président de Conseil national du numérique, s'opposant aux envolées autoritaires et insensées de l'ancien gouvernement. L'autre en tant que mathématicien, s'interrogeant de longue date sur la place politique des mathématiques et ayant d'ailleurs spécifiquement dédié un de ses ouvrages de vulgarisation à la question du chiffrement.
« Nous les appelons donc vivement, comme membre du gouvernement pour l'un et représentant de la Nation pour l'autre, à prendre publiquement position sur le chiffrement de bout en bout face aux positions de l'administration française ainsi que sur ce projet de RFC. Puisse la raison dont ils ont fait preuve par le passé s'exprimer de nouveau pour ramener un peu de sens à un débat que l'irresponsabilité et le mensonge semblent aujourd'hui dominer. »
Source : Quadrature du Net
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