Peut-on encore concevoir une application sans designer ?
De moins en moins, répond Microsoft lors des TechDays 2013, son événement annuel

Si l’on reprend les points mis en avant la semaine dernière par Jean Ferré, directeur de la division DPE (Développeurs, Plateforme et Ecosystème) de Microsoft France, lors des TechDays 2013, il en est un qui ressort particulièrement du lot : le design.

Le discours général de Microsoft souligne certes la simplification de ses outils de développement, l’émergence du Big Data – et son intérêt pour les applications, notamment mobile –, ainsi que la puissance du Cloud (comme back-end pour une application mobile ou pour héberger un projet) ou encore l’arrivée à maturité commerciale de ses plateformes. Mais le point le plus nouveau – et peut-être le plus troublant – est celui de l’ergonomie, de la conception des interfaces et de l’esthétisme que Microsoft veut imposer dans les applications Windows 8 et Windows Phone 8.

Ce point devient tellement important qu’une table ronde lui a été entièrement consacrée, tout de suite après la plénière du premier jour.

Baptisée « DESIGN DRESS CODE : Développeur-Designer », le duo star de l’année 2013 », elle a été l’occasion de présenter le nouveau « Monsieur Design » de Microsoft : Michel Rousseau.

Elle a également permis d’expliquer, par la voix de Jean-Louis Frechin, designer architecte français reconnu et spécialisé dans le design numérique et dans l'innovation (et éditeur du site NoDesign), que l’interface de Windows 8 s’inspirait directement du mouvement Bauhaus.


Le mouvement Bauhaus, inspiration artistique de la Modern UI de Windows 8

Pour la petite histoire, la filiale française a été la première à recruter un designer pour encadrer les projets et sensibiliser son écosystème. Le siège de Redmond s’est montré dans un premier temps très mitigé et dubitatif… avant de changer totalement d’avis, de trouver l’initiative stratégiquement centrale et de généraliser l’expérience un peu partout dans le monde.

C’est ce qu’expliquait Jean Ferré à Developpez.com lors d’un entretien passionnant sur ce sujet. Avec une question à la clef : un développeur peut-il encore concevoir une application sans designer ?

« Je vais vous répondre oui, parce qu’il est possible de faire une application qui tienne la route fonctionnellement sans designer. Mais je vais aussi vous répondre non, parce que c’est une histoire de goût artistique et de règles à connaître ». Des domaines auxquels les programmeurs ne sont pas nécessairement formés, même si pour le directeur de la division DPE « il n’y a pas non plus besoin de faire une école de design pour faire une application ».

Mais le message est là. Le code ne suffit plus. L’UI devient aussi importante que lui. « Il faut designer une application plutôt que de lui ajouter des fonctions », résume Jean Ferré.

Si le design est au cœur du métier de développeur, le numérique arrive aussi au cœur des préoccupations des designers. « C’est l’avènement d’un duo "développeur/designer" » qui se traduit notamment par la multiplication de binômes dans les agences et les SSII et l’obligation pour les designers d’acquérir des compétences de base en informatique. Pour devenir des « Devigners » (sic) comme Dominique Sciamma, directeur général adjoint de Strate College, présent lors de cette table ronde.

Côté développement pur, Blend, les templates de Visual Studio et des « guidelines claires » sont autant d’outils que Microsoft veut pousser auprès des développeurs pour les aider à aller vers le « beau ».


Blend for Visual Studio 2012, l'outil pour concevoir et générer des interfaces utilisateur

Alors, suffisant ou l’aide d’un designer est-elle indispensable ?

Pour répondre à notre question, nous sommes ensuite allés demander son avis à David Catuhe, responsable de l’expertise développeurs. Et créateur sur son temps libre de pas moins de quatre applications présentes sur le Windows Store (UrzaGatherer – un gestionnaire de cartes Magic, Social Screen – un tableau d’affichage de Tweet, WorldMonger – un jeu de stratégie à base d’herbe, de lapins et de renards, et Flip Flop – calepin numérique pour permettre aux enfants de faire des animations en faisant défiler les pages du carnet, comme à l’ancienne).

« Je travaille effectivement avec un ami designer… il faut dire aussi que je n’ai aucun goût esthétique », plaisante-t-il. Mais la réponse est claire : il devient de plus en plus difficile de tout faire soi-même.

Pourtant, l’antagonisme peut être important entre les designers et développeur. « C’est vrai, mais le développeur doit aujourd’hui faire un pas vers le designer. Et inversement. Il faut qu'ils sortent de leurs schémas respectifs ». Les deux auraient tout à gagner à collaborer à toutes les étapes, dès le début de la conception. « Quand ils travaillent de concert, il devient possible de montrer une photo d’une application à un client… alors même qu’il n’y a pas une ligne de code d’écrite ! C’est génial pour l'utilisateur. »

Reste à savoir comment trouver ces compétences pour les développeurs, notamment indépendants. Ces fameux « Moonlighters » (développeurs qui codent la nuit pour leur propre compte en plus de leur job) que Microsoft courtise.

L'éditeur répond en promettant d’organiser des événements pour faciliter les mises en relation. Et côté outils, « les "templates" de Visual Studio vont s’enrichir d’ici la fin de l’année », révèle David Catuhe en avant-première à Developpez.com.

Mais que ce soit grâce à des outils, un guide ou un professionnel du design, « toutes les applications développées sur Windows répondent désormais à un "dress code" design. Ce n’est pas une mode, c’est le signe d’une transformation profonde de la nature même d’une application logicielle : ce n’est plus une somme de fonctionnalité, c’est un système intelligent et immersif qui accompagne un usage », conclue Jean Ferré.

Vers une transformation en profondeur du métier de développeur ?


Source : Interviews Developpez.com, février 2013

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