Un "cercle vicieux" existerait entre le fait de se sentir moins connecté socialement et l'augmentation de l'utilisation des smartphones, d'après une étude des chercheurs de l'université de Victoria.

Selon une étude récente menée par des chercheurs de l'université de Colombie-Britannique et d'un laboratoire de médias en Allemagne, l'utilisation prolongée de smartphones pourrait avoir un impact négatif sur le bien-être mental et la connectivité sociale. Contrairement aux recherches antérieures qui s'appuyaient sur des données autodéclarées, cette étude, publiée dans le Journal of Social and Personal Relationships, a utilisé un suivi direct du temps passé devant un écran, révélant un "cercle vicieux" dans lequel le fait de se sentir moins connecté socialement conduit à une utilisation accrue du smartphone.

Le rôle que jouent les smartphones dans notre bien-être mental a fait l'objet d'un débat animé entre les chercheurs. Les études antérieures ont produit des résultats mitigés, certaines suggérant un impact négatif, en particulier chez les adolescents, tandis que d'autres affirment que l'impact est minime. L'une des limites importantes de ces études est qu'elles s'appuient sur l'utilisation autodéclarée des smartphones, qui est souvent inexacte.

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Cette nouvelle étude vise à combler cette lacune en suivant le temps d'écran réel et en mesurant ses effets sur le bien-être et la connectivité sociale. L'étude vise à résoudre les incohérences des recherches existantes en mesurant directement l'utilisation du smartphone et ses effets au fil du temps. Pendant six jours, les participants ont été interrogés plusieurs fois par jour pour évaluer leur bien-être et leur sentiment d'appartenance sociale, afin d'obtenir des informations plus nuancées et plus fiables.

L'étude a porté sur 325 utilisateurs d'Android, âgés de 14 à 80 ans et composés à 58 % de femmes, provenant principalement de l'université de Colombie-Britannique et de ses environs. Les participants ont installé une application de suivi d'écran appelée "BeTrack" et ont répondu à des questionnaires trois fois par jour pendant six jours. Des techniques statistiques avancées, connues sous le nom de modèles multiniveaux, ont été utilisées pour analyser les données et tester deux hypothèses liées à la manière dont l'utilisation du smartphone interfère avec les interactions sociales hors ligne ou les remplace.

Les résultats ont montré qu'une utilisation accrue du smartphone dans l'heure qui suit était liée à une baisse du bien-être immédiatement après, bien que les interactions sociales hors ligne aient atténué une partie de cet impact négatif. Une plus grande utilisation du smartphone conduit à se sentir moins connecté socialement, en particulier pour ceux qui avaient des niveaux moyens ou supérieurs d'interactions sociales hors ligne. En d'autres termes, une relation bidirectionnelle est apparue : le fait de se sentir moins connecté a conduit à une plus grande utilisation du smartphone, qui à son tour a conduit à se sentir encore moins connecté.


"Au sein des individus, nous avons constaté que lorsqu'une personne utilisait davantage son téléphone dans l'heure précédant l'enquête, elle déclarait des niveaux plus faibles de bien-être momentané. Nous n'avons trouvé aucune preuve de la voie inverse : un bien-être momentané plus faible n'a pas précédé un temps d'écran de smartphone plus long, ce qui suggère que l'utilisation du smartphone peut entraîner une diminution du bien-être, mais pas l'inverse", écrivent les chercheurs.

"Outre le bien-être, nous avons également voulu examiner l'impact de l'utilisation du smartphone sur les sentiments de connexion sociale. Les dynamiques dans le temps suggèrent que chez un même individu, l'augmentation de la durée d'utilisation du téléphone prédit une diminution du lien social, et que cette diminution du lien social prédit à son tour une augmentation de l'utilisation du smartphone. Ce lien bidirectionnel suggère une relation complexe entre la connectivité sociale et l'utilisation du smartphone et peut indiquer le risque d'un cercle vicieux".

Bien que l'étude soit unique en ce qu'elle établit des relations entre le temps passé devant un écran de smartphone et le bien-être, il est important de noter qu'elle n'a pas pu établir de manière définitive la causalité et qu'elle s'est limitée aux utilisateurs d'Android. En outre, l'étude n'a pas fait de distinction entre les différents types d'utilisation du smartphone, entre autres limitations démographiques, et l'application n'a enregistré le temps d'écran réel que lorsque l'écran était allumé, mais pas les moments où le téléphone était utilisé sans l'écran (comme la musique, l'écoute de podcasts, etc.).

Conclusion

La présente étude a examiné la relation entre le temps d'écran de smartphone directement mesuré et le bien-être et les sentiments de connexion sociale, en suivant les mêmes individus au fil du temps. Nous avons constaté que chez les mêmes personnes, une utilisation relativement plus longue du smartphone précédait un bien-être psychologique et un sentiment de connexion sociale relativement plus faibles. Pour le lien social, mais pas pour le bien-être, le chemin inverse était également significatif (ce qui suggère que la relation négative entre le temps passé devant un smartphone et le lien social pourrait être bidirectionnelle). Bien que la taille des effets observés soit relativement faible, l'omniprésence de l'utilisation du smartphone dans notre vie quotidienne implique que l'échelle et la portée de ces petits effets individuels (lorsqu'ils sont considérés globalement et tout au long de notre vie) ont le potentiel d'avoir un impact et méritent certainement d'être étudiés à l'avenir.
Source : Université de Victoria en Colombie-Britannique, Everyday Media Lab en Allemagne

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