Un mémo interne d'Amazon qui a fait l'objet d'une fuite révèle que l'entreprise manque de personnes à embaucher
les syndicats ne sont peut-être pas la plus grande menace pour le géant de la Tech
La fuite d'un mémo interne d'Amazon révèle que l'entreprise pourrait manquer de personnes à embaucher dans ses entrepôts américains d'ici 2024. Si cela se produit, la qualité du service et les plans de croissance du détaillant en ligne pourraient être menacés, ainsi que sa domination du commerce électronique. Le mémo, qui serait le résultat d'une étude de juin 2021, aurait révélé un taux de rotation des travailleurs horaires d'Amazon d'environ 150 % chaque année. En raison de cet état de choses, les dirigeants d'Amazon seraient inquiets de manquer de personnes à embaucher d'ici à trois ans.
« Si nous poursuivons nos activités comme d'habitude, Amazon épuisera l'offre de main-d'œuvre disponible dans le réseau américain d'ici 2024 », indique le mémo. Le document a été qualifié par les experts l'ayant obtenu d'"une tentative de réveil de la part des dirigeants d'Amazon". Le mémo contiendrait des recherches internes datant de 2021 qui prédisent une crise de la main-d'œuvre imminente pour le détaillant, qui toucherait certaines régions plus rapidement que d'autres. Par exemple, il estime qu'Amazon épuiserait sa réserve de main-d'œuvre à Phoenix, en Arizona, d'ici la fin de 2021 et dans l'Inland Empire de Californie d'ici la fin de 2022.
Le mémo aurait calculé le réservoir de travailleurs disponibles en utilisant des facteurs tels que les niveaux de revenus et la proximité des installations actuelles ou prévues d'Amazon. Le rapport exhorte l'entreprise à prendre des mesures pour combler le futur déficit de main-d'œuvre, notamment en augmentant les salaires pour conserver sa main-d'œuvre actuelle et attirer davantage de nouvelles recrues. Il suggèrerait également d'accroître l'automatisation dans les entrepôts. L'automatisation est en effet un domaine dans lequel Amazon a déjà beaucoup investi en rachetant Kiva Systems (connu aujourd'hui sous le nom d'Amazon Robotics) en 2012.
Mais selon une enquête datant de l'année dernière, les robots d'entrepôt d'Amazon ne seraient pas capables de gérer les tâches de traitement avancées qui ne peuvent être effectuées que par un travailleur humain. Selon le mémo qui a fuité, les modèles utilisés pour les prévisions de main-d'œuvre étaient exacts à 94 % lorsqu'il s'agissait de déterminer où, aux États-Unis, l'entreprise n'aurait pas assez de travailleurs pour répondre à la demande liée à l'Amazon Prime Day de juin 2021. Toutefois, un porte-parole d'Amazon a contesté la pertinence du document, déclarant que le mémo n'est pas une évaluation précise de la situation en matière d'embauche.
« Il existe de nombreux documents provisoires rédigés sur de nombreux sujets à travers l'entreprise qui sont utilisés pour tester des hypothèses et examiner différents scénarios possibles, mais qui ne sont pas ensuite transmis ou utilisés pour prendre des décisions. Ce document était l'un d'entre eux. Il ne représente pas la situation réelle, et nous continuons à bien embaucher à Phoenix, dans l'Inland Empire et dans tout le pays », a expliqué Rena Lunak, directrice des opérations mondiales et des communications sur le terrain chez Amazon. En revanche, les experts estiment que le taux de rotation d'Amazon est pire à Phoenix et dans l'Inland Empire.
Les travailleurs humains étaient autrefois une ressource abondante pour l'entreprise. Le géant de la technologie est le deuxième employeur privé des États-Unis et le plus grand employeur privé dans un certain nombre d'États et de villes américains. L'entreprise a annoncé son intention d'embaucher 125 000 travailleurs l'automne dernier, ce qui correspond à peu près à la population de Savannah, en Géorgie. Mais les nouvelles embauches semblent surtout remplacer des travailleurs qui ont été licenciés ou qui ont démissionné. Le taux de rotation d'Amazon serait d'environ 150 % par an, soit deux fois plus que dans les secteurs du commerce de détail.
En outre, le document indique que, si Amazon augmentait les salaires d'un dollar, il verrait une augmentation correspondante du nombre de personnes dans son bassin d'embauche de 7 %. Il suggère aussi que son personnel actuel pourrait travailler davantage ou qu'Amazon pourrait utiliser un outil pour transférer les travailleurs d'un entrepôt à l'autre en fonction de la demande. Et l'entreprise pourrait prendre en compte les bassins d'emploi disponibles pour les entrepôts dont l'emplacement est plus flexible. Toujours sur le marché de main-d'œuvre, Amazon doit également faire face à la concurrence des magasins à grande surface comme Walmart et Target.
Ces derniers offriraient désormais des salaires compétitifs à ceux qui ont de l'expérience dans les entrepôts. « Nous entendons beaucoup de travailleurs [d'Amazon] dire : "je n'ai qu'à traverser la rue pour aller chez Target ou Walmart" », a déclaré Sheheryar Kaoosji, codirecteur exécutif du Warehouse Worker Resource Center de l'Inland Empire. Cependant, les conclusions du rapport contrastent avec les déclarations de Brian Olsavsky, directeur financier d'Amazon, cette année. Olsavsky a déclaré en mai que l'entreprise était "rapidement passée d'une situation de sous-effectif à une situation de sureffectif". Il a ajouté que le problème allait "se dissiper".
Dave Clark, ancien cadre d'Amazon, aurait également proposé que l'entreprise réduise ses effectifs par licenciement. Les travailleurs d'Amazon ont longtemps fait état de conditions difficiles, et selon certains rapports, l'entreprise vise même à se débarrasser d'un certain nombre de travailleurs par an. Le premier entrepôt d'Amazon à Staten Island, à New York, s'est syndiqué en avril. Bien sûr, Amazon, qui a toujours lutté contre la syndicalisation de ces travailleurs, voit cela comme un affront et multiplie ses tentatives de dissuader les travailleurs des autres entrepôts de voter pour se syndiquer.
Dans une lettre envoyée aux actionnaires mi-avril, le PDG d'Amazon, Andy Jassy, a déclaré que les travailleurs sont "mieux lotis" sans syndicat et que le taux d'accidents du travail de l'entreprise est "mal interprété". Il a affirmé qu'un syndicat pourrait avoir un impact négatif sur la relation d'un travailleur avec son manager, ajoutant que le taux de blessures parmi les employés des entrepôts d'Amazon est "parfois mal compris". « C'est aux employés de choisir s'ils veulent ou non adhérer à un syndicat. Il se trouve que nous pensons qu'il est préférable qu'ils ne le fassent pas pour quelques raisons au moins », a déclaré Jassy lors d'une interview en avril.
« S'ils voient une chose qu'ils peuvent faire mieux pour les clients ou pour eux-mêmes, ils peuvent se réunir dans une pièce, décider comment le changer et le changer. Ce type d'autonomisation ne se produit pas lorsque vous avez des syndicats. C'est beaucoup plus bureaucratique, c'est beaucoup plus lent », a-t-il ajouté. Pour Amazon, se syndiquer est l'une des plus grandes erreurs que les employés pourraient commettre. Cependant, s'il s'avère que le mémo ayant fait l'objet de fuite reflète la réalité dans les entrepôts du leader mondial du commerce électronique, les syndicats ne seront peut-être pas son plus grand problème dans les années à venir.
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