Sur 11 000 magasins en ligne, 1254 utiliseraient des « dark patterns » pour amener les utilisateurs à acheter ou à souscrire à des offres ou services sans leur accord
selon une étude

Une équipe de chercheurs de l’université de Princeton dans le New Jersey et de l'université de Chicago a mené une récente étude sur les sites Web d'achats et a découvert qu’une grande partie d’entre eux pratiquait ce que l’on appelle le « dark programming ». Sur plus de 11 000 sites Web analysés, ils ont découvert 1 818 cas de « dark patterns », représentant ensemble 15 types de dark patterns. Ces 1818 cas de dark patterns sont présents sur 1254 des 11 000 sites Web d’achats (∼11,1 %) de leur ensemble de données.

Lorsqu’ils écrivent leurs programmes, les développeurs ont souvent recours à des pratiques obscures qui sont condamnables du point de vue de la morale ou de la loi. Ces pratiques sont connues sous le nom de dark patterns (en français : interfaces truquées) et peuvent être intégrées dans un concept qu'on désigne par le Dark Programming ou encore la programmation côté obscur. Ils constituent des astuces utilisées lors du développement de sites Web ou d’applications pour amener les utilisateurs à acheter ou à souscrire à des offres ou services sans leurs accords.

Une étude réalisée par une équipe de chercheurs de l’université de Princeton du New Jersey et de l'université de Chicago a révélé que l'utilisation des dark patterns est devenue très répandue sur les sites Web d’achats en ligne. L’étude présente des techniques automatisées qui ont permis aux universitaires d'identifier des dark patterns sur un grand nombre de sites Web. Les sites Web d’achats les plus populaires selon le classement Alexa seraient les plus susceptibles de présenter des motifs sombres.

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À l'aide de ces techniques, ils ont analysé environ 53 000 pages de produits provenant d'environ 11 000 sites Web commerciaux afin de caractériser et de quantifier la prévalence des dark patterns. Cela leur a permis de découvrir 1 818 cas de dark patterns, représentant ensemble 15 types et 7 catégories plus larges. Ils ont remarqué que 183 sites Web se livrent à de telles pratiques. Enfin, ils ont remarqué qu’il y a 22 entités tierces qui offrent aux sites Web d'achat la possibilité d’insérer des dark patterns sur leurs sites comme solution clé en main.

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Mais comment cela fonctionne-t-il ? L’équipe des universitaires a indiqué que la plupart des cas de dark patterns qu’elle a identifiés reposent sur la tromperie du consommateur. Voici quelques exemples de ce qu’elle a pu identifier dans ses recherches :

  1. se faufiler dans le panier : consiste à ajouter des produits supplémentaires aux paniers des utilisateurs sans leur consentement. L’équipe des universitaires a indiqué avoir trouvé environ 7 instances sur 7 sites Web différents ;
  2. coûts cachés : consiste à révéler des frais auparavant non divulgués aux utilisateurs juste avant de faire un achat. Prévalence : 5 instances sur 5 sites Web ;
  3. Abonnements cachés : consiste à imposer aux utilisateurs des frais récurrents sous prétexte d'un frais unique ou d'un essai gratuit.
  4. compte à rebours : consiste à indiquer aux utilisateurs qu'une offre ou un rabais expirera à l'aide d'une minuterie de décompte. Prévalence : 393 instances sur 361 sites Web ;
  5. confirmshaming : consiste à utiliser le langage et les émotions (la honte) pour empêcher les utilisateurs de faire un certain choix. Prévalence : 169 instances sur 164 sites Web ;
  6. interférence visuelle : consiste à utiliser un style et une présentation visuelle pour orienter les utilisateurs vers certains choix ou les éloigner de ceux-ci. Prévalence : 25 instances sur 24 sites Web ;
  7. vente sous pression : consiste à présélectionner des variantes plus coûteuses d'un produit ou faire pression sur l'utilisateur pour qu'il accepte les variantes plus coûteuses d'un produit et de produits connexes. Prévalence : 67 instances sur 62 sites Web ;
  8. inscription forcée : consiste à forcer les utilisateurs à créer des comptes ou à partager leurs informations pour mener à bien leurs tâches. Prévalence : 6 instances sur 6 sites Web.

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Il existe encore bien d’autres techniques que les chercheurs ont exposées dans leur étude. Ces différentes techniques sont regroupées en 7 catégories : action forcée, obstruction, rareté, preuve sociale, urgence, faufilement et erreur de direction. L'équipe de recherche s'attend à ce que les dark patterns de la catégorie preuve sociale deviennent encore plus populaires au cours des prochaines années. L'une des raisons, selon eux, est qu'il existe actuellement des sociétés tierces qui offrent des dark patterns comme solution clé en main.

Ces solutions sont soit sous la forme d'extensions et de plug-ins de magasin, soit sous la forme de services de personnalisation de magasin à la demande. Le tableau ci-dessous contient la liste des 22 tiers que l'équipe de recherche a identifiés à la suite de son étude comme fournisseurs de dark patterns comme solutions clé en main. Vous pouvez en savoir plus sur les dark patterns sur les sites Web d'achats en consultant le livre blanc intitulé « Dark Patterns at Scale : Findings from a Crawl of 11K Shopping Websites ». Les données brutes et les outils des chercheurs peuvent être téléchargés à partir du dépôt GitHub.

Sources : Université de Princeton, Livre blanc (PDF), GitHub

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