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Un enregistrement audio révèle que Boeing n’a pas cédé aux demandes des pilotes en colère de modifier les 737
Un enregistrement audio révèle que Boeing n’a pas cédé aux demandes des pilotes en colère de modifier les 737 Max,
En novembre dernier
Il y a du nouveau dans l’affaire Crashs aériens de Boeing 737 Max. Les données d’une réunion tenue quelques semaines après le premier accident mortel du 737 Max ont montré que les pilotes d'American Airlines ont pressé avec colère les dirigeants de Boeing de travailler d'urgence sur un correctif. En effet, Mike Sinnett, vice-président de Boeing, Craig Bomben, pilote d'essai de Boeing et John Moloney, lobbyiste en chef Boeing, ont participé à une réunion à huis clos qui a eu lieu au siège de l'Allied Pilots Association (l’APA) à Fort Worth, au Texas en novembre. L’APA représente les pilotes d'American Airlines.
Lors de la réunion privée, les pilotes ont demandé à Boeing de prendre des mesures d'urgence afin de réparer les défaillances du système mis en cause depuis le premier accident du Max 737. Les pilotes ont même demandé aux responsables de Boeing de pousser les autorités à émettre ce qu'on appelle une consigne de navigabilité d'urgence. Mais les responsables de Boeing ont résisté, car ces mesures d’urgence préconisées par le syndicat des pilotes auraient probablement immobilisé le 737 Max pendant longtemps, selon un enregistrement audio de la réunion que le syndicat a partagé avec CNBC.
Au lieu des mesures d’urgence, M. Sinnett a informé les pilotes présents à la réunion que l'entreprise travaillait sur une mise à jour de son logiciel, soupçonné d’être à la base des accidents mortels, qui serait prêt dans six semaines à partir de la date de la réunion, et qu'elle ne se précipitait pas au risque de faire un mauvais travail. Il a également déclaré aux pilotes que rien ne prouvait pour l’instant que le nouveau système fût à l’origine de l'accident du vol de la compagnie indonésienne Lion Air, qui a tué 189 personnes : « Personne n'a encore conclu que la seule cause de cette situation était cette fonction dans l'avion ».
En effet, un Boeing 737 Max de Lion Air a été impliqué dans un accident mortel en octobre dernier tuant 189 personnes. Environ cinq mois après ce premier crash, un second accident a frappé la compagnie Ethipian Airlines le 10 mars 2019. Dans les deux crashs, le logiciel de Boeing, le MCAS a été pointé du doigt.
Le premier rapport sur le crash du 737 MAX d'Ethiopian Airlines publié en début d’avril dernier, n’a pas donné d’analyse détaillée du vol, mais a établi assez clairement que les pilotes n’ont pas effectué de procédures incorrectes. Le rapport a préconisé au constructeur américain de revoir le système de contrôle de vol de son avion et a exhorté les autorités de réglementation compétentes à prendre toutes les dispositions afin de s’assurer que le problème a bien été résolu avant d’autoriser à nouveau ce type d’appareil à voler.
Toutefois, ce dernier accident aurait pu être évité si les responsables de Boeing avaient exécuté les demandes des pilotes d'American Airlines lors de leur réunion privée en novembre. Le syndicat a enregistré la réunion conflictuelle à l'insu des responsables de Boeing, parce qu'il craignait que Boeing ne traite pas la situation comme une urgence à l'époque, et a partagé l’enregistrement audio avec les médias dont CNBC. Selon l’enregistrement audio examiné par CNBC, les dirigeants de Boeing ont résisté aux demandes des pilotes d’American Airlines. Ils ne voulaient pas se précipiter pour trouver une solution, et ils s'attendaient à ce que les pilotes soient capables de régler les problèmes qui surviendraient.
CNBC a rapporté que lors de la réunion de novembre, les pilotes ont dit qu'ils n'étaient pas au courant du système logiciel anti-décrochage du 737 Max. Et ils étaient furieux que le système ne leur ait été révélé qu'après le crash d'octobre en Indonésie. Michael Michaelis, pilote d'American Airlines, a déclaré lors de la réunion : « Ces gars ne savaient même pas que ce fichu système était à bord de l'avion, ni personne d'autre ».
Michaelis, qui est aussi le chef de la sécurité du syndicat, a également exhorté Boeing à pousser la Federal Aviation Administration (FAA) à publier une directive de navigabilité d'urgence supplémentaire afin de mettre à jour le logiciel. La FAA avait déjà publié une directive après le crash de Lion Air, demandant aux compagnies aériennes de réviser leurs manuels de vol pour y inclure des renseignements sur la façon de réagir à un mauvais fonctionnement du système anti-décrochage appelé MCAS. Mais M. Michaelis a poussé Boeing à envisager d'en demander un autre afin de mettre à jour son logiciel.
Michaelis demanda lors de la réunion : « Ma question pour vous, en tant que Boeing, est pourquoi ne pas dire que c'est la chose la plus intelligente à faire ? » « Disons que nous allons faire tout ce que nous pouvons pour protéger ce public de voyageurs conformément à ce que nos syndicats de pilotes nous disent », avait-il ajouté.
Selon CNBC, Todd Wissing, un autre pilote américain, était furieux que le système MCAS ne soit pas inclus dans le manuel de formation de Max. Il s’est indigné lors de la réunion et a dit aux dirigeants de Boeing : « J'aurais pensé qu'il serait prioritaire de donner des explications sur les choses qui pourraient vous tuer ».
Cependant, M. Sinnett a déclaré que le géant américain de construction d’avion ne croyait pas que les pilotes de leurs clients avaient besoin de connaître l’existence du logiciel, puisqu'ils avaient déjà reçu une formation sur la façon de se comporter en cas d'urgence. En effet, le Boeing 737 Max est une mise à jour du 737 initial pour lequel les pilotes avaient déjà été formés. Boeing n’a pas jugé utile de faire une nouvelle certification qui pourrait lui perdre le temps. M. Sinnett a déclaré aux pilotes :
« Je ne sais pas si le fait de comprendre ce système aurait changé le résultat. Nous essayons de ne pas surcharger les équipages avec des informations inutiles pour qu'ils sachent quelles sont les informations que nous croyons importantes ».
Boeing fait l'objet d'un examen minutieux pour la conception et la certification du 737 Max, ainsi que pour sa réaction aux deux accidents. La Federal Aviation Administration est également sous le feu des critiques pour son rôle dans l'approbation du Max et pour sa décision d'attendre des jours après le deuxième accident avant d’interdire le 737 Max de vol.
En fin avril dernier, un article du journal le monde a rapporté que les inspecteurs de l’agence fédérale de l’aviation avaient découvert que Boeing avait choisi de rendre optionnel et payant le signal d’alerte lumineux depuis 2018, après que Southwest Airlines a demandé au constructeur américain de le réactiver à la suite de l’accident d’un 737 MAX de Lion Air en octobre dernier. Ils avaient émis l’hypothèse d’une immobilisation des avions pour se donner le temps de déterminer si les pilotes avaient besoin ou pas d’une formation supplémentaire, selon les sources d’information. Mais, après des discussions, les inspecteurs avaient finalement abandonné cette option.
Lors de la réunion privée, M. Sinnett a reconnu que le constructeur évaluait les défauts de conception potentiels de l'avion, y compris son nouveau logiciel anti-décrochage. Il a dit à ce sujet aux pilotes : « L'une des questions sera de savoir si notre hypothèse de conception est fausse ». « Nous sommes en train de réfléchir à la question : nos hypothèses étaient-elles vraiment valides ? » Pour ne pas dire, pendant que Boeing réfléchissait à l’époque à son hypothèse de conception, les 737 Max continuaient à voler, avec cette hypothèse de conception incertaine, transportant des milliers de personnes par jour.
Lors de la réunion, M. Sinnett est resté inébranlable sur le fait que les pilotes devraient savoir comment faire face à un dysfonctionnement du nouveau logiciel à bord de l'avion, compte tenu de leur formation existante. Boeing a refusé de commenter la réunion de novembre. Dans un communiqué, la compagnie a déclaré : « Nous nous concentrons sur la collaboration avec les pilotes, les compagnies aériennes et les organismes de réglementation mondiaux afin de certifier les mises à jour du Max et de fournir une formation supplémentaire pour que les avions puissent reprendre leur vol en toute sécurité ».
Depuis son interdiction de vol, les 737 Max sont restés immobilisés au sol jusqu’à présent et Boeing travaille toujours sur une mise à jour du logiciel. D’après CNBC, la compagnie a révélé également qu'elle était au courant du problème lié aux capteurs du Max Jet l'année précédant le crash du Lion Air, mais qu'elle n'a pas émis de correctifs. Avec ces nouvelles révélations et le premier rapport sur le crash d’Ethopian Airlines, les pilotes seront peut-être lavés de toute accusation de mauvaises manipulations.
Source : CNBC
Et vous ?
:fleche: Quel commentaire faites-vous de ces nouvelles révélations dans l’affaire crashs aériens de Boeing 737 Max ?
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Boeing admet que les simulateurs 737 Max n'ont pas reproduit fidèlement ce qu'était le vol sans MCAS
Boeing admet que les simulateurs du 737 Max n'ont pas reproduit fidèlement ce qu'était le vol sans MCAS
Selon un rapport
Chaque jour, il y a de nouvelles informations à propos de quelque chose qui n'a pas été divulgué ou qui a été fait par erreur ou qui n'était pas complet, avait déclaré Dennis Tajer, un porte-parole du syndicat des pilotes d'American Airlines et pilote d'un 737, à propos de l’affaire crashs aériens de Boeing 737 Max. Cette fois, l’avionneur a admis que les simulateurs de formation des pilotes de l’avion, qui a été à l’origine des accidents qui ont occasionné la mort des 189 personnes à bord du vol de la compagnie indonésienne Lion Air et des 157 personnes dans aéronef de la compagnie Ethiopian Airlines, ne reproduisaient pas exactement ce qui se passait avec le MCAS dans les conditions réelles de vol. En effet, selon Boeing, la désactivation du logiciel de contrôle de compensation en situation de formation ne donnait pas de résultats réalistes.
Le New York Times a rapporté le vendredi dernier que les simulateurs utilisés pour la formation des pilotes « ne reflétaient pas l'immense force qu'il faudrait aux pilotes pour reprendre le contrôle de l'avion » après avoir désactivé les commandes de compensation à assistance électronique. La désactivation du logiciel de contrôle de compensation en cas de mauvais fonctionnement du MCAS a été l’une des recommandations de Boeing après le premier accident mortel du 737 Max. Mais il se trouve que les pilotes, y compris ceux de la compagnie Ethiopian Airlines, n’avaient pas été formés à prendre en main ce qui suit la désactivation de ces fameuses commandes.
Cependant, Il semble que cette défaillance n’est plus d’actualité. Dans une déclaration, l'avionneur américain a déclaré qu'il avait « apporté des corrections au logiciel de simulation du 737 MAX et qu'il avait fourni des informations supplémentaires aux exploitants de l’appareil pour s'assurer que l'expérience du simulateur est représentative dans différentes conditions de vol ».
Pour rappel, le MCAS est un dispositif matériel et logiciel du Boeing 737 MAX destiné à éviter le décrochage en pilotage manuel. Quand il détecte que l'incidence de l'avion dépasse une valeur considérée comme dangereuse, en fonction de la vitesse et de l'altitude, il s'active pour compenser et emmener l’avion à voler horizontalement. Mais les pilotes n’ont eu connaissance de l’existence et du fonctionnement de ce dispositif qu’après l’accident du Lion Air. Lors d’une réunion secrète, que les responsables de Boeing ont eu en novembre avec les pilotes d’American Airlines, Mike Sinnett, vice-président de Boeing, a dit :
« Je ne sais pas si le fait de comprendre ce système aurait changé le résultat. Nous essayons de ne pas surcharger les équipages avec des informations inutiles pour qu'ils sachent quelles sont les informations que nous croyons importantes ».
Les instructions de Boeing après le premier écrasement étaient de désactiver les moteurs électriques du compensateur du stabilisateur, qui devraient empêcher le MCAS de fonctionner. Cependant, ces instructions ont poussé les pilotes à se fier au compensateur manuel, une très grande roue mécanique dans le poste de pilotage qui ne fonctionne pas forcément comme lors de la simulation.
Lorsque Boeing a lancé son 737 Max, il croyait que les pilotes n'avaient pas besoin d'expérience sur les simulateurs de vol, et la Federal Aviation Administration avait accepté. Le constructeur a trouvé que les pilotes pouvaient se passer de cette simulation au sol, a rapporté le New York Times la semaine dernière. Selon lui les organismes de réglementation ne l'exigent pas. Toutefois, de nombreuses compagnies aériennes avaient acheté ces appareils à coût plusieurs millions de dollars pour donner plus de pratique à leurs pilotes. Cependant, ces simulateurs de vol 737 Max approuvés par Boeing ne reproduisaient pas correctement ces forces sur le volant de compensation mécanique, mais auraient plutôt pu donner un faux sentiment de sécurité aux pilotes.
Sur le vol Ethiopian Airways, les pilotes ont eu du mal à tourner le volant mécanique alors que l'avion se déplaçait à grande vitesse et que la pression de l’air était immense sur la queue. Les simulateurs ne correspondaient pas à ces conditions, et les pilotes ont constaté que le volant était beaucoup plus facile à tourner qu'il aurait dû l'être. Il semble qu’après avoir réussi à couper le compensateur électrique selon les instructions de Boeing, les pilotes du vol ET302 d'Ethiopian Airways, n'ont pas pu déplacer le volant de compensation contre les forces aérodynamiques énormes causées par l'accélération vers le sol de l’avion.
Les organismes de réglementation tentent maintenant de déterminer quelle formation sera nécessaire pour les pilotes avant de lancer de à nouveau les avions 737 Max.
Les mises logicielles seraient prêtes et testées par Boeing
Boeing a déclaré, la semaine dernière, qu'il avait terminé la mise à l'essai de ses mises à jour logicielles sur son 737 Max. Selon l’avionneur, le correctif apporté rendra possible ce qui suit :
- Le système de commandes de vol va maintenant comparer les entrées des deux capteurs de l'angle d’attaque. Si les capteurs sont en désaccord de 5,5 degrés ou plus avec les volets rentrés, le MCAS ne s'activera pas et un indicateur sur l'écran du poste de pilotage avertira les pilotes ;
- Si le MCAS est activé dans des conditions anormales, il ne fournira qu'une seule entrée pour chaque événement de l’angle d’attaque élevé ;
- Désormais, le MCAS ne peut plus commander plus de stabilisateur que l'équipage de conduite ne peut contrer en tirant sur la colonne. Les pilotes auront toujours la possibilité d'outrepasser le MCAS et de contrôler manuellement l'avion.
Selon Boeing, ses mises à jour régleront le problème du MCAS. Boeing a déclaré qu'il avait également fourni « des renseignements supplémentaires pour répondre aux demandes de la FAA qui comprennent des détails sur la façon dont les pilotes interagissent avec les commandes et les écrans de l'avion dans différents scénarios de vol. Une fois les demandes traitées, Boeing travaillera avec la FAA pour planifier son vol d'essai de certification et soumettre la documentation finale de certification ». Une formation supplémentaire à l'intention des pilotes devrait faire partie du correctif.
Bien que les 737 Max soient cloués au sol jusqu’à présent, certaines compagnies comme Ryanair continuent « à avoir la plus grande confiance en ces avions ». Ryanair a commandé un certain nombre de 737 Max qui seront livrées « à l'hiver 2019 (sous réserve de l'approbation réglementaire par l'AESA) ». Le groupe allemand TUI également devrait décider, d'ici la fin du mois, d’abandonner ou pas l'espoir de voler avec ses 737 Max pour la saison des fêtes de cette année.
Depuis que l’avion a été frappé d’interdiction de vol, Boeing n’a pas encore reçu de nouvelles commandes. Mais avec les corrections logicielles apportées au MCAS et au simulateur de vol ainsi que les formations supplémentaires à donner aux pilotes, les choses pourraient changer lors du prochain salon international de l'aéronautique et de l'espace du Bourget, un grand événement commercial qui aura lieu le mois prochain.
Toutefois, la compagnie doit encore soumettre les changements aux organismes de réglementation, qui devront les approuver avant que l'avion puisse recommencer à voler. Espérons que le système MCAS soit devenu opérationnel, que les régulateurs fassent leur travail et que les pilotes soient correctement formés et informés des mises à jour dans l’avion.
Source : Boeing, The New York Times
Et vous ?
:fleche: Que pensez-vous des ces nouvelles informations ?
:fleche: Pensez-vus qu’avec ces dernières mises à jour, le 737 Max de Boeing va décoller bientôt ?
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Le calvaire de Boeing continue malgré le sommet mondial organisé par la FAA
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Pour discuter du cas des 737 Max toujours interdits de vol
La réunion organisée hier à Fort Worth au Texas à l’initiative de la Federal Aviation Administration (FAA) et de plusieurs autres régulateurs mondiaux de l’aviation civile ne laisse pour l’instant entrevoir aucune solution satisfaisante pour l’avionneur américain Boeing : aucun calendrier fixant la date de retour en service effective des 737 MAX du groupe n’a été arrêté. Les régulateurs qui ont participé à ce sommet ne se sont accordés que sur un point : la nécessité de prolonger l’interdiction de vol qui frappe tous les Boeing 737 MAX depuis le 13 mars dernier à la suite de deux catastrophes aériennes distinctes impliquant ce modèle, qui ont couté la vie à 346 personnes.
La FAA a profité de cet évènement pour renouveler sa promesse de procéder à un examen rigoureux de toute les solutions proposées par Boeing pour attester du respect draconien des critères de sécurité et de fiabilité exigés. La position ferme de l’organisme chargé de donner le feu vert à tout ce qui vole aux États-Unis dans ce dossier sensible peut apparaître comme une tentative de la FAA de reprendre la main alors qu’un audit du ministère des Transports américain sur les procédures de certification de l’organisation est en cours et qu’une enquête a été ouverte par le Département de la Justice afin de déterminer si Boeing a fourni « des informations incomplètes ou trompeuses » sur le 737 Max.
Il faut rappeler que le dispositif de stabilisation en vol qui doit permettre d’éviter le décrochage des 737 MAX, le MCAS, est impliqué dans les deux catastrophes aériennes qui ont frappé la compagnie indonésienne Lion Air le 29 octobre 2018 et Ethiopian Airlines le 10 mars 2019. La FAA ayant délégué une partie du travail de certification du 737 MAX au constructeur Boeing, certains estiment que ces deux entités sont responsables de la validation du MCAS défectueux de première génération et d’une certaine manière aussi responsables des deux crashs mortels de Boeing 737 MAX. Par ailleurs, des soupçons de collusion entre Boeing et la FAA ont commencé à faire surface vu le temps qu’il a fallu à la FAA pour prendre les mesures de sécurité d’urgence qui s’imposaient : la réaction tardive de la FAA contrastait fortement avec celle des autorités chinoises et européennes compétentes qui ont rapidement décidé de clouer au sol tous les Boeing 737 MAX en raison des similitudes existant entre les deux crashs qui impliquaient des jets 737 MAX de Lion Air et Ethiopan Airlines.
L’absence de consensus sur un calendrier de redéploiement est tout sauf une bonne nouvelle pour Boeing. Ça laisse supposer que les autorités de régulation devraient au mieux aboutir à une nouvelle certification en ordre dispersé de l’appareil. À ce propos, Dan Elwell, le chef intérimaire de la FAA, a déclaré que « le seul calendrier est de s’assurer que l’avion est sûr avant de voler », précisant que « chaque pays devrait prendre sa propre décision » pour les autorisations de remise en service, selon son propre agenda. Des représentants de l'Union européenne et du Canada ont par exemple assuré qu'ils n'autoriseraient pas les 737 Max à redécoller tant qu’ils n’auraient pas procédé à des révisions indépendantes.
Cette attitude devrait probablement marquer la fin du processus habituel de certification des avions commerciaux qui jusqu’ici était basé sur la réciprocité : quand la FAA donnait son feu vert, les autres régulateurs lui emboîtaient le pas. La trentaine de pays qui ont participé à ce sommet sont d’autant moins enclins à se précipiter que la FAA a reconnu que Boeing ne lui avait toujours pas soumis pour évaluation la mise à jour pourtant annoncée en grande pompe en mars dernier du MCAS, le système de stabilisation en vol qui doit permettre d’éviter un décrochage du 737 MAX. Certains pays, comme la Chine pourraient se montrer très exigeants, ne serait-ce qu’à cause de la guerre commerciale qui oppose actuellement Pékin aux Etats-Unis.
En marge de cette réunion, il faut signaler que le Syndicat national des pilotes de ligne d’Air France a de son côté exhorté l’Agence européenne de la sécurité aérienne à faire preuve de « transparence et d’indépendance » parce que « les seuls points de vue de Boeing et de la FAA ne sauraient suffire ». Il est encore trop tôt pour déterminer si le 737 Max nécessitera une formation sur simulateur pour les pilotes, ce qui demeure une option que certains pays comme le Canada pourraient exiger. Mais tout d’abord, les organismes de réglementation doivent évaluer les changements apportés au logiciel de Boeing. Un groupe d'experts de la FAA qui conseille l'agence sur la formation des pilotes a publié un rapport préliminaire en avril, concluant que les séances de simulation n'étaient pas nécessaires pour le 737 Max. Le rapport n'était pas définitif et l'agence n'a pas pris de décision.
L’interdiction de vol prolongée des 737 MAX risque d’affecter lourdement les comptes de Boeing. L’avionneur devra dédommager les compagnies aériennes possédant l’un des 737 MAX livrés avant l’interdiction mondiale de vol. Il devra aussi s’occuper de ses autres clients, notamment du manque à gagner qu’ils accusent à cause du retard de livraison des 737 MAX déjà commandés qui devaient être livrés depuis le 13 mars dernier. Un mois après le début de l’immobilisation des 737 MAX, Boeing a annoncé une première ardoise de 1 milliard de dollars et il devra bientôt faire face aux actions en justice intentées par les familles des victimes des deux accidents. Des spécialistes du secteur estiment d’ailleurs que « les malheurs du 737 MAX vont coûter des milliards au constructeur américain qui va avoir des problèmes de cash et devra mobiliser toutes ses énergies pour résoudre cette affaire ».
Source : Bloomberg, AFP
Et vous ?
:fleche: Qu’en pensez-vous : Boeing mérite-t-il tout ce qui lui arrive ?
:fleche: L'avionneur américain pourra-t-il sortir indemne de cette affaire ?
:fleche: Pensez-vous que Pékin puisse utiliser cette affaire comme moyen de pression pour obtenir des concessions de la part de l’administration Trump dans le cadre du bras de fer commercial qui les oppose ?
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