Le scandale des arnaques aux jeux en réseaux sociaux fait rage : MySpace et Zynga réagissent mais est-ce suffisant ?
Des jeux comme Farmville and Mobsters font un tabac sur les sites de réseaux sociaux. Ils permettent aux utilisateurs de ces réseaux communautaires de se retrouver, cachés sous un avatar, dans un monde virtuel (par exemple, une ferme) et d'y interagir tous ensemble de façon ludique (vendre ses récoltes sur le marché, recruter des ouvriers agricoles, acheter la vache du voisin, arroser ses plantations, nourrir ses poussins, etc...).
L'engouement est déjà là et des centaines de milliers de personnes passent littéralement des heures scotchées à leur écran pendant qu'elles utilisent ce type de jeux. Mais ce succès semblerait fleurir via un arrosage pas très éthique...
Les joueurs sont sans arrêt sollicités pour payer (avec leur vrai argent) afin d'obtenir divers crédits ou options supplémentaires dans le jeu, ou bien pour passer au niveau supérieur. Mais ceux qui ne paient pas se voient proposer d'autres "alternatives" qui se révèleront au final encore plus coûteuses qu'un paiement direct.
Pour l'obtention de crédit supplémentaire dans leur jeu, les non-payants sont ainsi submergés d'offres du type "renvoi vers des partenaires". Et cela fonctionne comme un cercle vicieux, dans un vrai écosystème.
Les joueurs se font avoir, les jeux gagnent de l'argent, puis réinvestissent ces sommes dans Facebook et MySpace en publicité afin d'enrôler de nouveaux utilisateurs, qui payent à nouveau, etc...
Ainsi, les développeurs de jeux faisant les plus gros bénéfices, sont ceux pouvant ensuite faire le plus de publicité et avoir le plus de visibilité (comme Zynga), au détriment des autres qui se retrouvent de plus en plus loin derrière (comme Slide).
Autrement dit, les jeux abusant le plus de la crédulité de leurs utilisateurs, sont en tête.
Tous les utilisateurs ne sont pas stupides, heureusement. Certains se faisant par exemple pièger dans une souscirption d'abonnement mobile arrivent à retourner l'arnaque en leur faveur, en s'inscrivant et se désinscrivant plusieurs fois (grâce au droit de rétractation) et gagnent ainsi encore plus de cybercrédits. L'arroseur arrosé en somme.
Mais ces "fausses pubs" qui forcent les internautes à souscrire à certains services font également du tort aux annonceurs sérieux qui, refusant de berner le peuple, se retrouvent sur le carreau au profit de leurs confrères sans scrupules.
Les offres piégées les plus courantes consistent à "offrir" une demo gratuite d'un service en échange d'une inscription avec numéro de carte de crédit, qui sera ensuite débitée puisque la demo aboutira inévitablement sur l'adhésion à l'offre complète présentée, sans que l'internaute n'ai été prévenu.
Les plateformes hébergeant tout ce petit monde (Facebook et MySpace) ont théoriquement le pouvoir pour réguler tout cela, et certaines de ses "offres" mensongères sont d'ailleurs interdites par leur charte. Mais les développeurs n'en ont cure et passent outre cette interdiction, et les administrateurs de ces sites Internet repassent très rarement derrière pour nettoyer.
Il faut dire que Zynga dépense plus de 50 millions de dollars en publicité sur Facebook par an, ce qui expliquerait une telle tolérance de la part du géant des sites communautaires. L'argent n'est pas sale, puisqu'il vient de compagnies légitimes comme Zynga, Playfish, Playdom et autres ; mais il provient en partie d'utilisateurs s'étant fait pièger...
De plus, Facebook ayant récemment neutralisé le spam de ses applications, cela renforce le problème : les jeux ne peuvent plus se répandres par ce biais, il leur faut donc toujours plus d'espaces publicitaires. Et donc plus d'arnaques.
Mais alors qui protègera les internautes dans cette histoire ? Le gouvernement, en dernier recours ?
Comment reconnaître une arnaque ? Lorsque les contiditions sont cachées ou pas clairement expliquées, et que l'on se rend compte en les lisant que casiment personne ne souscritait à un tel service ou ne commanderait un tel objet en toute connaissance de cause (et que donc les gens souscrivent sans les connaitre), ça sent l'annonce pas très honnête.
Voici quelques exemples typiques :
Un utilisateur se voit proposer quelques crédit à utiliser dans son jeu favori, en échange de quelques secondes consacrées à remplir un test de QI (ne comprenant que 4 petites questions). Le test terminé, on demande au sondé d'entrer son numéro de mobile pour recevoir ses résultats. La personne reçoit ensuite un SMS contenant un code chiffré à entrer sur le site, prétenduement pour voir ses résultats. En fait, ce geste lui fait souscrire à un abonnement mensuel de 9.99 dollars, à durée illimitée (pour un bien piètre service de tests et autres jeux de questions inutiles) !
Un autre ? Des joueurs se voient offrir des crédits s'ils acceptent de recevoir un "CD d'apprentissage gratuit de la part de Video Professor, seuls les frais de port (de 10 dollars) sont à votre charge". Chouette ! Mais la facture finale, qui s'ouvre dans une page séparée du checkout de la commande, les informe qu'ils recevront en fait un set complet de disques pour la somme de 189.95 dollars (à moins de les retourner). Certains utilisateurs ne les renvoient jamais car, n'étant pas au courant de cette somme supplémentaire et pas forcément rigoureux avec leurs relevés de compte bancaire, ils ne se rendent comptent de rien.
Il est malheureux de constater qu'un grand nombre de développeurs de ce secteur sont prêts à sacrifier honnêteté et morale pour de l'argent rapide et facile. Les soucis rencontrés par leurs clients..euh, zut..par leurs utilisateurs, ne semblent guère les affecter.
Leur crédo : attirer les joueurs en les laissant jouer gratuitement puis, une fois qu'ils sont accros, leur demander de payer pour évoluer dans le jeu.
Markus Frind, le fondateur de PlentyOfFish (sorte de Meetic américain), a abordé le sujet avant hier sur son blog.
Il s'y dit surpris que les médias ne se soient pas saisis de l'affaire plus tôt alors que ce type d'escroquerie existe depuis plusieurs années déjà. "Chaque mois, je reçois des tas d'e-mails de la part d'annonceurs qui me promettent monts et merveilles. Evidemment je pourrais me remplir les poches avec ces arnaques, mais ce n'est pas légal et pourrait en plus apporter des sanctions de l'état."
Il affirme également que certaines de ces arnaques soutirent près d'un million de dollars journaliers. Une sacrée vache à lait pour un jeu de fermiers !
Andrew Trader, co-fondateur de Zynga, a également pris la parole hier. Il a ainsi déclaré publiquement qu'environ 1/3 des revenus de son entreprise provenait des activités publicitaires. Aussi, comme les rentrées annuelles avoisinent les 250 millions de dollars, on peut supposer qu'un tiers équivaut à plus ou moins 80 millions de dollars. Sur cette somme, quel pourcentage est fait d'offres alléchantes mais mensongères ?
Evidement, Offerpal et les autres compagnies proposant ce genre de services douteux aux développeurs de jeux vidéos tentent tant bien que mal d'en dissimuler les véritables (et juteux) chiffres des bénéfices.
Hier, suite au buzz provoqué par l'étalement de cette affaire sur le web, Mark Pincus (le CEO de Zynga), a lui aussi décidé de s'exprimer publiquement sur son blog :
"Je reconnais que certaines de ces offres donnent une mauvaise image de notre industrie en lui faisant du mal. C'est pourquoi nous avons fait de gros efforts afin de supprimer ce type de propositions trompeuses de nos offres. Le pire en la matière, Tatto Media, à d'ores et déjà été définitivement banni de notre catalogue. Nous serons désormais plus agressifs, et nous avons revu à la hausse les critères de validation des fournisseurs afin de filtrer le type d'offres que nous publierons sur les réseaux. Toutes les publicités mobiles ont également été supprimée jusqu'à ce que nous en trouvions une correcte à afficher."
Beau geste. Mais cela suffira-t-il ?
En réponse à cette question, c'est un nouveau communiqué de presse qui nous est parvenu ce matin. L'un des acteurs principaux de cette affaire à enfin décidé de s'exprimer.
MySpace vient ainsi d'annoncer l'instauration d'une tolérance zéro pour ce type de publicités et le renforcement des restrictions imposées à ses développeurs d'applications concernant le type d'offres qu'ils présenteront au public. Le CEO du site, Owen Van Natta, a de plus annoncé que les utilisateurs du réseau social pourront choisir d'accepter ou de refuser l'affichage d'une telle proposition, dès lors qu'elle proposera une souscription (quelle qu'elle soit).
Les Conditions d'Utilisation du site seront donc mises à jour dans la semaine, et MySpace promet de supprimer prochainement toutes les applications qui ne les appliqueront pas.
Mais ceci suffira-t-il ? Et surtout, cela excuse-t-il que de telles actions aient pu être commises impunément ?
Une réaction de Facebook est désormais très vivement attendue. En effet, le principal vecteur de ces arnaques en ligne reste bien silencieux.
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