L’autre grande raison avancée par EDF pour expliquer ses déboires, c’est la « perte de compétences ». «
Les équipes ayant participé à la construction des 58 réacteurs français sont à la retraite. Le manque d’expérience de nos équipes nous a coûté », justifie Xavier Ursat. Pour ne rien arranger, la filière, dont l’image a pâli, attire moins les jeunes ingénieurs. Résultat, EDF a eu du mal à recruter le personnel idoine. « Je me suis retrouvé à un poste de responsabilité qui dépassait le niveau de mes qualifications », raconte, sous le sceau de l’anonymat, un ingénieur EDF, diplômé de grande école qui a passé plusieurs années à Flamanville. Tout cela relève d’un malaise qui ne date pas d’hier. Les chantiers des quatre derniers réacteurs raccordés au réseau dans la seconde moitié des années 1990, ceux de Chooz (Ardennes) et Civaux (Vienne), avaient déjà traîné en longueur. Ils avaient duré entre huit et douze ans, alors que les centrales précédentes avaient été bouclées en cinq ans.
Des erreurs de management commises peu avant le lancement du programme EPR ont aussi pesé sur le niveau des équipes. En 1998, François Roussely,
un énarque arrivé à la tête d’EDF, a voulu marquer son territoire en se débarrassant d’une puissante baronnie, la Direction de l’équipement, qui avait mené la construction rapide d’un parc de centrales nucléaires. Même remue-ménage au moment de la constitution d’Areva, en 2001, quand Anne Lauvergeon, la présidente du directoire, s’est séparée des anciens dirigeants de Framatome qui avaient conçu les réacteurs. Elle aussi, pour asseoir son pouvoir. « Elle a écarté des dossiers tous les techniciens les plus compétents », raconte Bernard, ex-géologue de la maison.
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