Le gouvernement américain doit s'impliquer dans la course à l'IA contre la Chine,
Le secteur privé ne peut pas à lui seul s'attaquer à la Chine et son industrie, d’après un cadre du Nasdaq
Les entreprises qui innovent et dominent l’industrie de l’intelligence artificielle sont dans leur grande majorité américaines. On peut par exemple citer Google et Microsoft qui sont des poids lourds reconnus à l’échelle mondiale. Mais selon un responsable de Nasdaq, le secteur privé américain ne peut pas à lui seul concurrencer l'ensemble du gouvernement et du secteur privé chinois en matière de développement technologique. En effet, le gouvernement chinois a déjà commencé à « investir massivement » dans le développement de nouvelles technologies basées sur l'intelligence artificielle, a-t-il dit.
Edward Knight, vice-président du Nasdaq, a déclaré à CNBC dans le cadre de FinTech Abu Dhabi que les États-Unis doivent adopter une « approche stratégique » dans leur compétition avec la Chine sur l'intelligence artificielle. L'IA est un domaine qui ne va se développer qu'en partenariat avec le gouvernement, et les autorités américaines doivent s'impliquer, a déclaré le cadre du deuxième plus important marché d'actions des États-Unis.
M. Knight a rappelé que le gouvernement chinois a déjà commencé à « investir massivement » et à travailler avec son secteur privé pour développer de nouvelles technologies basées sur l'intelligence artificielle, a rapporté CNBC. En 2017, Pékin a déclaré vouloir devenir le leader mondial de l'intelligence artificielle d'ici 2030 et vise à ce que cette industrie représente 1 000 milliards de yuans (152 milliards de dollars). Il a inclus une feuille de route sur la façon dont l'intelligence artificielle pourrait être développée et déployée.
Le plan de développement national que la Chine a projeté de mettre en place à l’époque pour l’émergence de l’intelligence artificielle « made in china » prévoit d’augmenter le poids économique de ce secteur d’avenir de 150 milliards de yuans (22,15 milliards USD) jusqu’en 2020 à 400 milliards de yuans (59,07 milliards de dollars) à l’horizon 2025, selon les chiffres officiels fournis par le gouvernement chinois à l’époque.
Pékin a montré depuis lors avoir compris les enjeux du développement de l'IA et n’a pas souhaité rester les bras croisés en regardant d’autres pays investir massivement dans cette industrie qui devient de plus en plus décisive et incontournable. « Nous devons prendre l’initiative pour nous attaquer résolument à cette nouvelle étape du développement de l’intelligence artificielle et avoir une avance en termes de compétitivité », avait déclaré à l’époque le gouvernement chinois.
« Je pense que les États-Unis sont déjà en tête, mais ils ont besoin de plus ... d'une approche stratégique impliquant le gouvernement », a déclaré M. Knight à Dan Murphy de CNBC dans le cadre de FinTech 2020, qui s'est tenu en ligne comme plusieurs autres événements technologiques cette année à cause de l’urgence sanitaire liée du coronavirus. « Le secteur privé ne peut pas à lui seul s'attaquer à l'ensemble du gouvernement chinois et du secteur privé, qui est très concentré sur ce point ».
Prévoyant que la société bénéficiera de toute innovation issue de l'intelligence artificielle, M. Knight a ajouté : « Si les États-Unis veulent continuer à être une économie en croissance et innovante, ils doivent maîtriser cette nouvelle technologie ».
L'intelligence artificielle fait référence à la technologie dans laquelle les ordinateurs imitent l'intelligence humaine, par exemple dans la reconnaissance d'images et de formes. Malgré le fait que la technologie soit très utile dans de nombreux secteurs allant des services financiers aux soins de santé, certains critiques, notamment le PDG de Tesla, Elon Musk, la considère comme étant « plus dangereuse que les armes nucléaires ».
Musk craint que l'IA se développe trop rapidement pour que les humains puissent la gérer en toute sécurité, mais les chercheurs l’ont qualifié de « sensationnaliste ».
L’impact que pourrait avoir la nouvelle administration Biden sur l’investissement en IA
Edward Knight s'est également prononcé sur ce que signifierait une présidence Biden pour le marché des introductions en bourse. Il a déclaré que le rythme des investissements ralentit traditionnellement lorsqu'un nouveau président entre en fonction parce qu'il y a une incertitude sur les changements de politique possibles.
Toutefois, il estime que les taux d'intérêt bas et la probabilité d'un gouvernement divisé sont positifs pour le marché des introductions en bourse. « Nous nous attendons à ce qu'il n'y ait pas de changements radicaux, si vous voulez, dans la politique publique », a déclaré M. Knight. « Le changement se fera progressivement, et je pense que cela rendra les marchés plus prévisibles ».
Pendant ce temps, CNBC rapporte que la Réserve fédérale a déclaré ce mois-ci qu'elle maintiendrait les taux près de zéro aussi longtemps que nécessaire pour aider l'économie à se remettre des effets de covid-19. « Avec des marchés plus prévisibles et des taux d'intérêt bas, je pense que vous continuerez à avoir une demande saine et une réserve d'introductions en bourse », a déclaré M. Knight.
Knight n’est pas le seul a faire le constat que les États-Unis étaient en perte de vitesse par rapport à la course à l’IA. L'ancien directeur général de Google, Eric Schmidt, a déclaré en septembre que les USA ont « perdu la main » sur le financement de la science fondamentale dans la lutte pour la domination technologique entre les États-Unis et la Chine. Schmidt, l’actuel président du Conseil de l'innovation du ministère américain de la Défense, a déclaré qu'il estimait que les États-Unis étaient déjà en avance sur la Chine en matière de progrès technologique, à l'heure actuelle. Mais la distance se réduit rapidement.
En dehors des États-Unis et la Chine, l’heure est également à l’encouragement à l’investissement dans l’intelligence artificielle. Le président français Emmanuel Macron a annoncé en 2018 le déblocage d'une enveloppe de 1,5 milliard d'euros jusqu'en 2022 pour soutenir le développement et la recherche en IA en France. Dans ce fonds, un montant de 400 millions d’euros serait utilisé pour des « appels à projets et de défis d’innovation de rupture », avait-il annoncé au Collège de France, il y a plus de 2 ans.
Emmanuel Macron avait promis également « augmenter la porosité entre la recherche publique et le monde industriel ». De sorte que les chercheurs français puissent à terme consacrer 50 % de leur temps à un groupe privé. Mais selon Noël Paganelli, cofondateur de l'école de code La Capsule, la France ne sera jamais compétitive face aux acteurs comme les GAFA. La raison avancée, c’est que le plan français pour l’IA est une initiative nationale, ce qui a pour conséquence, entre autres, de retarder le développement de l’IA.
Selon un commentateur, « Le problème avec la Chine contre les États-Unis dans la course à l'IA est que les citoyens américains ont des lois protégeant leur vie privée, la Chine n'a pas ce problème, donc les données alimentant l'IA sont plus vastes que celles des Amériques ». L’avancée rapide de la Chine reposerait sur la disponibilité des données de formation grâce à l’absence de contraintes empêchant certains développements qu’on peut trouver aux États-Unis, selon lui. La France n’admet pas aussi certains développements dans le secteur. Par exemple, la France a banni en 2019 les IA de prédiction des comportements des juges.
En effet, alors qu’aux États-Unis et au Royaume-Uni, les juges semblent avoir accepté le fait que des entreprises technologiques analysent leurs décisions de manière extrêmement détaillée et créent ensuite des modèles de leurs comportements, en France, les juges n'acceptent pas ces pratiques. C’est ainsi que le gouvernement français a, dans une mesure qui vise à limiter le secteur émergent de l’analyse et de la prédiction de l'issue des contentieux, interdit la publication d’informations statistiques sur les décisions des juges.
Selon le commentateur, « Les données, c'est le nouveau pétrole. Les particuliers devront perdre tous leurs droits afin que les pays soient compétitifs sur le marché de l'IA ». « Malheureusement, l'avenir sera géré par ceux qui ont la meilleure AI ... donc d'une manière ou d'une autre, les gens perdent en raison de la prédiction du comportement », a-t-il ajouté.
Se penchant sur ce que signifierait une nouvelle administration américaine pour le marché des introductions en bourse, Edward Knight a également déclaré que la priorité du président élu est de gérer la crise du coronavirus et « d'arriver, espérons-le, à disposer d'un vaccin largement disponible », qui servirait de base à la reprise.
« Nous ne pouvons pas avoir une économie forte avec un peuple américain en mauvaise santé », a-t-il déclaré, selon CNBC. « Une fois que nous pourrons restaurer leur santé et faire face à la pandémie, je pense que vous commencerez à voir l'économie se rétablir complètement ».
Source : CNBC
Et vous ?
Qu’en pensez-vous ?
L'intelligence artificielle est un domaine qui ne va se développer qu'en partenariat avec le gouvernement. Êtes-vous d’accord avec cette opinion ? Pourquoi ?
Selon vous, de quelle manière les gouvernements pourraient s’impliquer auprès du privé pour booster le développement de l’IA ?
Faut-il sacrifier la vie privée des utilisateurs pour être compétitif ?
Voir aussi :
Eric Schmidt, ex-patron de Google : les États-Unis ont « perdu la main » sur l'innovation, la Chine a supplanté les USA en tant que premier éditeur mondial de recherche en sciences et en ingénierie
La Chine veut devenir leader mondial de l'intelligence artificielle, avec un plan de développement national visant à augmenter son poids économique
Macron veut investir 1,5 milliard d'euros dans l'intelligence artificielle, mais exclut l'idée de doubler les salaires suggérée par Cédric Villani
IA : pourquoi la France aurait-elle du mal à concurrencer les GAFA ? Un entretien avec Noël Paganelli, cofondateur de l'école de code La Capsule
Partager