Etude : il n’a fallut que « relativement peu de » bots pour propager la désinformation
Et submerger les vérificateurs de faits
Le débat politique a souffert durant la période électorale en 2016 aux Etats-Unis à cause des « fake news », des informations non crédibles qui étaient diffusées sur les réseaux sociaux par des faux comptes ou des comptes automatisés. Il a été révélé ensuite que cette campagne de diffusion de fausses actualités et de discours politiques conflictuels a été menée par des acteurs étrangers basés en Russie. Après les élections qui ont vu l’accession de Donald Trump à la Maison Blanche, des critiques des utilisateurs, des organisations de protection des droits sur Internet et des institutions ont suivi traitant les responsables des réseaux sociaux d’être incapables de protéger leurs plateformes.
Depuis lors, d’énormes efforts sont consentis par ces plateformes pour éradiquer ce fléau de fausses nouvelles afin de, non seulement, retrouver la confiance de leurs utilisateurs, mais également, pour empêcher que les prochaines élections à travers le monde ne subissent pas le même sort. En septembre 2017, Twitter avait annoncé avoir supprimé des centaines de comptes qui auraient tenté de manipuler la présidentielle américaine de 2016. En mai 2018, Facebook a également annoncé avoir supprimé 583 millions de faux comptes au premier trimestre 2018, lors d'un point de sa lutte compte les contenus illicites.
Mais, malgré les efforts des réseaux sociaux, les faux comptes persisteraient sur leurs plateformes. Le rapport d’une étude publiée en octobre dernier, a suggéré que la stratégie employée par Twitter pour combattre les infox est inefficace et que plusieurs faux comptes auraient été épargnés.
Une nouvelle étude menée dans ce même contexte s’est intéressée au rôle clé joué par les bots sociaux dans la diffusion de contenus peu crédibles. L’étude dont le rapport a été publié le mardi dernier dans la revue universitaire Nature Communications a été menée par des chercheurs de l'Université de l'Indiana. Selon le rapport, « relativement peu de comptes sont responsables d’une grande partie du trafic qui contient de la désinformation ». Selon les chercheurs, les bots seraient à l’origine de la majorité des tweets diffusés au cours de la période électorale aux Etats-Unis. Seulement 6 % des comptes Twitter identifiés comme des bots sont responsables de 31 % du contenu « peu crédible ».
Les chercheurs se sont intéressés, dans le cadre de leur étude, à 14 millions de tweets liés à plus de 400 000 articles publiés entre mai 2016 et fin mars 2017, période couvrant les élections présidentielles aux Etats-Unis. Parmi ces articles, 389 569 provenaient de « sources peu crédibles » qui avaient été signalées plusieurs fois par les vérificateurs des faits – dont le rôle consiste à contenir des informations erronées –, tandis que 15 053 articles provenaient de « sources de vérification des faits », selon NBC News.
Après analyse, les chercheurs ont découvert que plus de 13,6 millions de tweets étaient liés à des « sources peu crédibles » tandis qu’environ 1,1 millions de tweets provenaient des sources de vérification des faits connues. Ceci montre clairement une expansion rapide des fausses nouvelles par rapport aux informations de sources crédibles.
« Les bots amplifient la portée du contenu peu crédible, au point qu'il est statistiquement impossible de le distinguer de celui des articles de vérification des faits », ont écrit les chercheurs. Ils ont découvert que pour aboutir à pareils résultats les bots sociaux auraient recouru à deux méthodes pour emmener les utilisateurs à croire à la validité de l’article lié et à retweeter la publication.
Méthodes utilisées par les bots sociaux
« Premièrement, les robots sont particulièrement actifs pour amplifier le contenu dès les premiers instants de diffusion, avant qu'un article ne devienne viral », ont écrit les chercheurs.
Selon le rapport, le succès des bots est du, selon cette première méthode, à la capacité de multiplication rapide du contenu peu fiable de sorte à les rendre populaires afin de profiter de la tendance des humains à faire confiance aux opinions largement partagées. Selon les auteurs, « les gens ont tendance à faire davantage confiance aux messages qui semblent émaner de nombreuses personnes ». « Les robots exploitent cette confiance en faisant en sorte que les messages paraissent si populaires que les vrais gens sont amenés à les diffuser pour eux. »
« Deuxièmement, les robots ciblent les utilisateurs influents par le biais de réponses et de mentions. » A titre d’exemple, les chercheurs ont fait référence à comment un bot social a mentionné le compte Twitter officiel du président Donald Trump, @realDonaldTrump, dans 19 messages Twitter liés chacun à un article prétendant faussement que des immigrés sans papiers avaient soumis des millions de voix lors des éléctions. Selon les chercheurs, les bots le font ainsi sachant que les célébrités retweeteront ensuite ces contenus à leurs abonnés. Ce qui donne plus de valeur aux contenus et les rend susceptibles d’être retweetés à nouveau, selon NBC News.
Cependant, les utilisateurs ne pouvaient pas faire de distinction entre les tweets des bots sociaux et ceux des humains, car ces derniers « ont retweeté les bots qui publient des contenus peu crédibles presque autant qu'ils ont retweeté les autres humains », ont écrit les chercheurs. Toute fois, les chercheurs ont fait remarquer la lutte que mènent les réseaux sociaux contre ce phénomène social, même s’ils pensent que « leur efficacité est difficile à évaluer », a rapporté NBC News.
Selon les chercheurs, les bots ne partagent pas que des informations de source peu crédible. Ils peuvent également servir d’amplificateur des alertes d’urgence, par exemple. Cependant, selon les chercheurs, leur éradication serait un compromis acceptable, vu les dommages qu’ils peuvent occasionner.
Solutions pour l’éradication des bots des réseaux sociaux
Selon les chercheurs, les solutions humaines de suppressions des bots en cours d’utilisation ne sont malheureusement pas adaptées au volume d’abus permis par les bots. Ils déclarent qu’ « il est donc impératif de soutenir la recherche sur de meilleurs algorithmes de détection des abus et sur des contre-mesures qui tiennent compte de l'interaction complexe entre les facteurs cognitifs et technologiques qui favorisent la propagation de la désinformation ».
Cependant, une solution durable ne serait-elle pas dans la législation ? En France, un projet de loi qui obligera les plateformes à coopérer avec l'État pour limiter la diffusion de toute fausse information jugée virale a été adopté par l’Assemblée Nationale.
Source : NBC News, Rapport
Et vous ?
Qu’en pensez-vous ?
Voir aussi
De nouveaux chiffres publiés par Twitter révèlent que plus de 600 000 comptes ont été exposés à l'influence russe, pendant la présidentielle aux USA
Facebook supprime 583 millions de faux comptes au premier trimestre 2018, l'entreprise fait le point de sa lutte contre les contenus illicites
Twitter : près de 300 000 comptes liés au terrorisme ont été suspendus ce dernier semestre, 75 % d'entre eux n'ont pas eu le temps de faire un tweet
Une recherche suggère que la stratégie employée par Twitter pour combattre les infox est inefficace, plusieurs comptes auraient été épargnés
La future loi contre les Fake News obligera les plateformes à coopérer avec l'État, pour limiter la diffusion de toute fausse information jugée virale
Partager