L'alliance Gravity espère gagner des parts sur le marché français de la publicité
qui est dominé par Facebook et Google
Fin janvier 2017, le Syndicat des régies internet (SRI) a publié une étude sur l’écosystème de la publicité en France. Cette étude a révélé que, pour la première fois, le marché français de la pub sur internet a dépassé celui de la télévision en 2016. 3,5 milliards d’euros ! C’est le poids de ce marché en 2016 dont les deux tiers (environ 2,3 milliards d’euros) ont été encaissés par le duo Google - Facebook.
Une situation qui n’est pas fortuite : si nous considérons les catégories de publicités que représentent les liens sponsorisés sur les moteurs de recherche et les bannières publicitaires, il devient plus simple de voir une conséquence de la domination de Google sur le marché de la recherche qui lui confère un quasi-monopole sur les liens sponsorisés. Il en va de même pour Facebook et les bannières publicitaires.
Que faire donc lorsque les GAFA (Google, Apple, Facebook et Amazon) sont ultra-dominateurs sur le marché de la publicité, régnant sans partage ? La réponse : le projet Gravity.
Il s’agit là d’une plateforme numérique commune et automatisée d’achat d’espaces publicitaires destinés aux annonceurs. Ces groupes mettent leurs données en commun pour devenir plus performants dans la publicité « programmatique », dont la vente est effectuée automatiquement à l’aide d’algorithmes et de systèmes d’enchères.
L’objectif est d’avoir un meilleur ciblage des utilisateurs, qui permettra de vendre une publicité plus précise et plus chère aux annonceurs, et ainsi de rivaliser avec Google et Facebook, dont la force repose justement sur la quantité de données qu’ils détiennent.
La plateforme va regrouper les données sociodémographiques, professionnelles, de géolocalisation, des centres d’intérêt, de consommation et d’achat. Les mots d’ordre sont « brand safety » (garantie d’un espace premium), bon « reach » (une bonne exploitation des données) et disponibilité de publicités sur tous les formats.
Gravity est financée par une société dont les six fondateurs (les Echos-le Parisien, Lagardère, SoLocal, SFR, Prisma, M6) sont actionnaires à parts égales et ouvrira en septembre avec une version test.
« Dans la data [données personnelles, ndlr], il y a trois éléments clés : le volume, la qualification et la technologie pour la traite », explique Francis Morel, qui est à la tête des Echos et du Parisien. Il a fait valoir que « Seuls, chacun de notre côté, nous sommes incapables d’y arriver.» Raison pour laquelle ils ont eu l’idée de se regrouper
« L’union fait la data », a lancé Denis Olivennes, le patron de la branche médias de Lagardère. « Notre complémentarité sur le sujet n’est pas incompatible avec notre concurrence dans les contenus. Plus nous serons nombreux, mieux nous nous porterons. »
Toutefois, le projet Gravity ne réunit pas que des groupes de presse et de médias. En effet, en plus des médias de Lagardère Active (Europe 1, Paris Match), L’Equipe, M6, Les Echos-Le Parisien, Next Radio TV (BFMTV, RMC), Condé Nast (Vogue), Prisma (Femme Actuelle), Marie Claire, Sciences & Avenir, Challenges, les groupes de presse régionale La Montagne, Sud Ouest, La Dépêche, Le Télégramme, elle intègre également l’opérateur télécoms SFR, le distributeur Fnac Darty et la maison mère des Pages jaunes, SoLocal Group. Au total, les membres de Gravity touchent 44 % des internautes français chaque jour, soit 16 millions de personnes.
Si l’initiative en elle-même peut-être louable dans la mesure où des opérateurs français essayent de gagner des parts d’un marché qui appartient presque aux GAFA, il convient tout de même de se demander s’il est moral, voire légal, de partager ainsi des informations des utilisateurs.
Rappelons que le GDPR, le nouveau règlement européen sur la protection des données, va entrer en vigueur dès 2018 et s’appliquer à toute entreprise qui collecte, traite et stocke des données personnelles dont l’utilisation peut directement ou indirectement identifier une personne. Ce règlement impose entres autres de minimiser les données personnelles collectées. L'article 5 du règlement européen précise à ce titre que les données personnelles doivent être « adéquates, pertinentes et limitées à ce qui est nécessaire au regard des finalités pour lesquelles elles sont traitées (minimisation des données). »
De plus, il n’est pas précisé si, dans le cadre du projet Gravity, les utilisateurs vont devoir donner leur consentement explicite pour que leurs données soient collectées. De manière plus globale, faut-il généraliser la collecte d’informations personnelles ou au contraire l’interdire sans consentement ?
Source : Libération
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