USA : le Sénat envisage de forcer les entreprises IT à aider les agents fédéraux
à accéder à des données chiffrées après mandat du juge
La question du chiffrement des dispositifs de communication fait toujours l’objet de vifs débats dans différents pays, surtout avec les derniers actes terroristes perpétrés à différents endroits dans le monde. En face de la communauté de la technologie qui croit que le chiffrement fort est essentiel pour empêcher les pirates et autres de violer la vie privée des utilisateurs, se trouvent les responsables de l’application de la loi qui craignent d’être incapables d’accéder aux dispositifs et communications chiffrés des criminels.
Pour tenter de résoudre ce désaccord de longue date entre les entreprises de haute technologie et la police, deux sénateurs américains de premier rang s’apprêtent à introduire un projet de loi. Le projet élaboré par le sénateur républicain Richard Burr, chef du comité du Renseignement du Sénat américain et Dianne Feinstein, sénatrice senior du parti démocrate, envisage de forcer les entreprises IT à aider la police et les agents fédéraux à contourner le chiffrement de leurs dispositifs si le tribunal l’ordonne.
« L'objectif sous-jacent est simple : quand il y a une ordonnance du tribunal d’apporter une assistance technique aux forces de l’ordre ou de fournir des informations déchiffrées, cet ordre de la Cour doit être exécuté, » avertissent les deux sénateurs dans une déclaration conjointe, avant de rappeler : « aucune personne physique ou morale n’est au-dessus de la loi. »
Le projet de loi ne précise pas dans quelles circonstances une entreprise serait obligée d’aider les forces de l’ordre. Il ne crée pas non plus de sanctions spécifiques pour les entreprises qui refusent de se soumettre à l’ordonnance du juge. Les sénateurs Richard Burr et Dianne Feinstein disent travailler encore avec les parties prenantes pour finaliser le projet de loi, qui a été maintes fois retardé.
En fuite en ligne depuis le jeudi, le projet de loi a été immédiatement condamné par des chercheurs en sécurité et défenseurs de la vie privée. Dans un communiqué, Kevin Bankston, directeur de l'Open Technology Institute, considère cela comme « la proposition de politique technologique la plus ridicule, la plus dangereuse et la plus techniquement analphabète du XXIe siècle. »
Un autre membre du comité de Renseignement du Sénat américain et défenseur de la vie privée, le sénateur démocrate Ron Wyden, voit en cette proposition une manière d’exiger aux « entreprises américaines de construire des portes dérobées » dans leurs dispositifs. « Pour la première fois en Amérique, les entreprises qui veulent protéger leurs clients avec une sécurité renforcée n'auront pas ce choix, » s’insurge-t-il. Ron Wyden estime que par cette loi, les entreprises « seront tenues de décider comment affaiblir leurs produits pour rendre les Américains moins en sécurité », en promettant de faire tout ce qui est en son pouvoir pour empêcher cette loi de passer.
Le projet de loi devrait être présenté personnellement au président Obama par le chef de cabinet de la Maison-Blanche Denis McDonough, ce lundi. Un porte-parole de la Maison-Blanche aurait toutefois déclaré que l’administration n'a pas décidé de soutenir ou non la proposition de loi alors qu’elle est encore en phase de finalisation.
Sources : Reuters, Washington Post
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