Primo il fut un temps où à gauche on défendait les plus faibles. Mais de nos jours pour trop de pseudo-gauchistes, ça veut dire défendre les immigrés et cracher sur les prolos. Le prolétaire est devenu une victime commode à gauche, une figure dont on aime se moquer. Critiquer les musulmans est politiquement incorrect, fussent-ils salafistes, mais l'expression "white trash" est bien vue. Cherchez l'erreur. C'est dramatique, et c'est la raison pour laquelle la gauche perd les élections les unes après les autres en Europe et va disparaître. Hollande lui-même n'aurait jamais pu gagner sans Sarkozy et son discrédit.
Mais tu veux savoir ? Le prolétaire est celui qui a le plus morflé ces dernières décennies : pendant que la Silicon Valley fleurissait, le revenu médian US réel diminuait, les prix des biens de première nécessité explosaient dans tous les pays, la probabilité pour un enfant d'ouvrier français de devenir cadre reculait petit à petit et l'emploi industriel fuyait la France alors qu'il augmentait en Allemagne ou aux États-Unis. Le prolétaire n'a clairement rien à attendre de l'UMP ou du PS : avec eux il est certain de devenir encore plus pauvre et humilié. Ils n'ont aucune réponse pour lui. Pire : ils sont occupés à bâtir une nation anglophone dans lequel notre prolo est l'équivalent d'un sourd muet analphabète. Et lorsque le prolo se plaint que la majorité des individus de son quartier ou de son équipe de travail ont une autre culture que lui il se fait insulter alors même que les hypocrites qui le vilipendent détesteraient tout autant cette situation, dont ils sont bien éloignés.
Là arrive une politicienne qui prétend, elle, avoir des solutions. C'est essentiellement faux bien sûr, ils le savent, même si elle a des arguments plus pertinents que ses adversaires sur certains sujets. Mais au point où ils en sont ils se disent qu'ils n'ont plus rien à perdre à essayer. Au moins elle offre un doute, là où les autres offrent des certitudes.
Et surtout, ce n'est pas comme si en face le débat était plus élevé. Je n'ai jamais eu l'occasion de voir un débat intéressant sur l'EU à la télé et les tribunes du Monde, de Mediapart, du Figaro ou de Marianne valent à peine mieux et se vautrent en général dans la zone de confort de leurs lectorat respectifs. La grande majorité des commentateurs restent dans le superficiel et servent des positions d'autorité qu'ils ne s'embarrassent jamais d'argumenter. C'est le règne de la médiocrité politique, de la superficialité des analyses. Quant à nos dirigeants, soit ils sont tout simplement incompétents, soit ils sont incapables de transmettre leurs analyses.
Au passage une petite remarque : si les prolos sont moins instruits, la corrélation entre position sociale et intelligence est en revanche très faible. Et encore l'instruction dont jouissent les cadres est-elle spécialisée : un diplôme d'ingénieur ne t'offre en général aucune clé, ou si peu, pour comprendre l'économie ou les problèmes politiques contemporains. La réalité c'est que les discours des cadres sont à peu près aussi superficiels que ceux des prolos, même si beaucoup d'entre nous affectionnons de croire le contraire. La vraie différence marquante entre cadres et prolétaires, c'est qu'ils appartiennent à deux univers sociaux distincts dont ils reproduisent chacun les codes d'intégration.
Enfin je voudrais te faire noter qu'à l'occasion des cantonales ce n'est pas MLP qui a sorti de nulle part la question des repas végétariens à la cantine pour porter le débat vers (contre) l'Islam, c'est Sarko. Quand un million de personnes ont défilé pour réclamer la discrimination des homos, ce n'est pas MLP qui portait l'étendard anti-pédés, c'était l'UMP. Et quand Guéant sortait une provocation raciste chaque vendredi à 11h, sa carte politique indiquait UMP, pas FN. Et sinon les copains salafistes du PS, tu crois qu'ils en pensent quoi du mariage homo et de la liberté d'expression de Charlie Hebdo ? Pendant ce temps 70% des français trouvent qu'il y a trop d'étrangers. Je le déplore mais ça n'est pas le monopole des prolos que tu haïs tant.
Mais bien sûr qu'il va être élu. Il va devenir pour la droite ce que les verts sont pour la gauche. A moins que ce ne soit l'UMP qui devienne un satellite du FN.Le FN lui par contre est en dehors du système. Il n'a jamais été élu et ne le sera probablement jamais.
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