Les médias peuvent et doivent informer, mais on en est bien loin, dans ce cas précis...
Je crois que le peuple arrive à penser sans les médias, et que les médias ont souvent, ces derniers temps, montré qu'ils n'étaient pas plus neutres que le premier blogueur ou militant venu (sachant que les affaires, ce ne sont pas des journalistes qui "enquêtent", mais des "sources", dont l'anonymat est garanti, qui choisissent de diffuser des informations à un moment précis... aucune indépendance, aucune neutralité)
Et si je dois choisir entre un peuple qui se prononce sans l'aide du Canard Enchaîné, sur la base de ce qu'il voit ou croit voir, et des médias, alimentés par des "sources" anonymes, qui décident de la légitimité de tel ou tel candidat, et de l'importance relative des sujets à débattre (tu noteras que cela fait quelques semaines qu'on ne parle plus de programme...), en démocratie, je choisis le peuple.
Je pense que tu confonds élection d'un représentant et prix de vertu. Par l'élection, les français sont censés se choisir un représentant, qui exécutera en leur nom un programme. La base du contrat, c'est le programme, et c'est là dessus qu'on devrait se déterminer. Le rôle des médias est effectivement d'éclairer ce choix, en comparant les programmes. Ils peuvent également éclairer sur l'honnêteté des candidats, mais c'est un rôle accessoire.
Et dans tous les cas, si l'on attend des médias qu'ils décernent aux candidats des brevets de vertu, il faut le faire en amont, pas au milieu du processus. Faire des présélections, avec un jury, comme dans toute émission de téléréalité qui se respecte...
Deux choses m'ennuient dans cette affaire. Le timing, qui déraille complètement le processus primaire/élection, que ces mêmes médias nous présentaient il y a peu comme un absolu démocratique, et le recentrage de la campagne sur des questions de moralité personnelle, qui fait disparaître le débat de fond. Je suis d'accord que sur ce dernier point, Fillon leur a tendu une perche, mais je pense que la situation ainsi créée est très peu démocratique.
Je pense que les politiques sont des personnes publiques, qui doivent donner une image publique, en accord avec la fonction qu'ils briguent. Un peu comme un patron doit incarner la personne morale qu'est son entreprise. Cette personne morale n'a pas, a priori, besoin d'être la même que la personne privée. Je peux être banquier costard cravate la semaine et fêtard en bermuda le week-end, personne n'a rien à y redire.
Pour les politiciens, cela devrait être pareil, les choses deviennent compliquées quand l'opinion, et les médias, prétendent les juger sur leur authenticité, c'est à dire l'adéquation entre leurs personnes publiques et privées. Quelque part, en disant que la légitimité de Fillon vient de l'exemplarité de son comportement privé, on ne le considère plus comme notre représentant, élu du peuple et agissant en son nom, mais comme une sorte d'ouvrier modèle, choisi sur son apparence.
Je pense que cette dérive est très dangereuse, parce qu'elle transforme peu à peu les élus par des pantins, et que quand elle est appuyée par des médias qui appartiennent à de grands groupes affairistes, et sont alimentés par des officines anonymes, le peuple ferait bien de se demander si on n'est pas en train de lui piquer ses prérogatives.
Francois
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