IdentifiantMot de passe
Loading...
Mot de passe oublié ?Je m'inscris ! (gratuit)
Voir le flux RSS

Au Pied Levé - À Main Levée

III-3. BIBLIOGRAPHIE : LA STRATÉGIE DES ÉQUIPES AD OC

Noter ce billet
par , 01/04/2020 à 08h15 (263 Affichages)
APL-AML est une monographie fragmentée en plusieurs billets pour des raisons de volume.
Un billet SYNOPSIS et un billet SOMMAIRE agrègent tous les billets du blog via des liens hypertextes.

■ ■ ■ SOMMAIRE DU BILLET ■ ■ ■

Avertissement de l'auteur
  1. Le pouvoir de l’adhocratie
  2. Démarrer
  3. Gérer
  4. Obtenir des résultats
  5. Créer le bon environnement
Postface
LA STRATÉGIE DES ÉQUIPES AD HOC
(Robert H. Waterman - 1990)

■ AVERTISSEMENT DE L’AUTEUR

Conçu comme une recherche en devenir, ce livre transmet un message : « Découvrir le pouvoir de changer ».

1. Le pouvoir de l’adhocratie

Il est surprenant de constater à quel point une entreprise peut réagir vite lorsqu’elle rompt avec ses habitudes, transgresse certaines règles et regroupe au sein d’une équipe les individus compétents pour saisir une opportunité ou pour solutionner des problèmes.

Cette démarche que l’on peut appeler simplement l’« adhocratie », qualifie schématiquement toute forme d’organisation qui va à l’encontre de la bureaucratie pour aborder le changement. L’adhocratie coupe à travers les organigrammes, les départements, les fonctions, les profils de poste, la hiérarchie et les traditions.

L’adhocratie peut s’exprimer de manière très banale comme une discussion autour d’un café, mais peut aussi prendre une forme dramatique. Il s’agit alors d’initier, de conduire une équipe de projet (task force) pour obtenir des résultats, sans renverser totalement les règles bureaucratiques. Malheureusement, ce type d’attitudes nécessite un ensemble de qualités pour lesquelles il n’existe pas de formation.

Sauf au Japon où gérer l’adhocratie est un cadre normal de management, nous avons naturellement tendance à penser la structure fondamentale de toute organisation en termes essentiellement bureaucratiques. Les règles et les procédures nous guident quotidiennement et nous faisons notre possible pour utiliser la bureaucratie lorsque nous sommes confrontés au changement. Mais le changement ignore les procédures et c’est toujours en dehors des circuits normaux que l’on trouve la véritable activité. Nul n’étant prophète en son pays, les entreprises recourent de plus en plus à des cabinets de conseil en management qui mettront à leur disposition une, voire plusieurs équipes ad hoc.

Le théoricien du management Warren Bennis (1960-1970) puis Alvin Toffler dans Le choc du futur (Denoël, 1974), parlaient déjà de formes ad hoc, sans que personne ne songe à développer cette idée, à l’appliquer au monde professionnel ou à identifier les thèmes récurrents qui les distinguent.

Une équipe ad hoc bien gérée a plusieurs caractéristiques :

  1. Comme le changement lui-même, elle traverse les frontières et les clivages habituels.

  2. Thomas Tusher, président de Levi Strauss & Co, dit que toute action impacte l’ensemble des autres dimensions fonctionnelles de l’entreprise et seule une task force permet de réunir plusieurs disciplines différentes.

  3. Son objectif est d’opérer un véritable changement.

  4. Gage vital de l’application des décisions, l’adhocratie bien conduite nécessite une large participation, implique en fait tout le monde.

  5. Attaquer de front le problème majeur et récurrent qu’est l’absence de communication.

  6. Contrairement au management pyramidal hérité de la bureaucratie qui fait circuler les ordres de haut en bas, les membres de l’équipe deviennent peu à peu les moteurs de la compréhension en profondeur des décisions prises et de leur mise en œuvre en douceur.

Les meilleures idées sont le plus souvent le fruit d’un effort collectif. Une démonstration classique et frappante de cette force de l’équipe comparée à l’individu a acquis une notoriété certaine sous la forme d’un test simulé de survie en univers hostile. Les équipes proposent toujours des plans de survie meilleurs que ceux imaginés par les individus seuls.

Combattre l’habitude

La plupart d’entre-nous sommes contraints par des idées et des normes qui n’ont plus cours. C’est Frederick Winslow Taylor qui en 1881 a initié les raisonnements limités qui emprisonnent notre façon de réfléchir au management. Pour lui, les hommes étaient des robots, les entreprises pouvaient et devaient « programmer » les ouvriers et les tâches répétitives qu’ils avaient à accomplir.

C’est le sociologue Max Weber qui au début du XXème siècle conçut sa théorie de la bureaucratie dans le but de lutter contre la corruption et les pratiques injustes de gestion héritées de la Révolution industrielle.

Les idées de Weber sur le management et celles de Taylor sur la force de travail ont construit l’idée d’une organisation pyramidale, hiérarchique et bureaucratique qui continue de façonner les organisations, d’où le manque d’expérience et d’entraînement aux types de fonctions qui traversent les frontières habituelles.

Le problème, c’est l’habitude réconfortante des comportements traditionnels, stéréotypés et sans réflexion qui prévaut sur la peur stressante du changement rapide et de l’échec. Pour rompre avec ce paradigme du management, à cette hégémonie bureaucratique, les chercheurs en sciences humaines préconisent :

  1. De déclarer publiquement sa volonté du changer,

  2. De faire le plus vite possible au moins un pas dans le sens du changement,

  3. De n’accepter aucune exception,

  4. De valoriser explicitement et de façon importante les nouveaux comportements et ne pas ralentir le rythme afin de ne pas laisser revenir les anciennes habitudes.

« Vers la lumière »

C’est Vince Lombardi, entraîneur des Green Bay Packers (équipe de football américaine), qui aboyait à son joueur en possession du ballon « cours vers la lumière ». Autrement dit : invente, saisis l’opportunité, écoute ton bon sens.

L’adhocratie ne ressemble à rien de connu. C’est une aventure et elle doit être vécue comme telle. Que le but à atteindre soit de concevoir un nouveau produit, de faciliter le travail en commun de départements distincts ou de sauver une entreprise en crise, l’atmosphère doit être à l’excitation, à l’expérimentation et à l’urgence.

Attention ! L’expression de l’adhocratie peut aller du meilleur au pire. Certaines entreprises sont littéralement minées par les task forces ; d’autres cherchent à éviter absolument l’adhocratie en ayant recours à la sous-traitance ou au mieux en l’utilisant sur des questions peu importantes ; d’autres enfin, qui ne sont qu’adhocratie étant petites se transforment en se développant en structures plus rigides encore que la plus fossilisée des bureaucraties.

Il n’y a pas lieu d’opposer adhocratie et bureaucratie, toutes deux sont nécessaires. Dès les années 70, Peter Drucker théoricien du management, avait prédit cette dualité mais les entreprises possèdent rarement cette faculté de passer sans heurts de l’une à l’autre et inversement. Sans la capacité et la sécurité nécessaires pour ouvrir une parenthèse adhocratique dans leur carrière, les cadres n’apprennent pas et ne font que reproduire les mêmes anciennes erreurs.

2. Démarrer

Un bon départ met les membres de l’équipe en confiance et crée un climat de réussite qu’il est difficile d’entamer. Une équipe bien constituée peut surmonter des erreurs de management et obtenir malgré elles des résultats alors qu’une équipe mal partie peut fonctionner comme un métronome et pourtant ne jamais obtenir de résultats.

Soutien clair et explicite de l’encadrement

Pour fonctionner efficacement l’adhocratie doit être accréditée, obtenir du sommet de l’organisation un soutient explicite, total, connu de tous les collaborateurs. L’implication de la hiérarchie doit être réelle, exister dès le début du projet et doit être constante tout au long des travaux quel qu’en soit le résultat. C’est la règle fondamentale pour le démarrage d’une équipe. Procéder autrement revient à neutraliser une task force et décrédibilise la direction.

Le travail ad hoc est difficile, tressant, extrêmement improvisé. L’évolution des projets prend toujours des tours inattendus. Il impacte la vie familiale des membres de l’équipe, impose des déplacements, nécessite un changement d’attitude, peut déconnecter les membres de leur cadre habituel dans l’organigramme. Par ailleurs, les systèmes de rémunérations ne prévoient pas la rémunération des longues heures de travail et des efforts supplémentaires inéluctables.

Une liaison étroite avec la direction via des comités d’orientation garde les équipes sur de bons rails en leur évitant les pièges classiques que sont les pistes tangentes mais permet surtout d’afficher et de réaffirmer l’implication de la hiérarchie dans la poursuite du projet.

Le test du panneau d’affichage

Les leaders d’équipes comme leurs membres doivent être les personnes de la situation, ni trop influentes, ni trop peu. Encore aujourd’hui, l’un des problèmes récurrents du leadership s’avère être le style de management agressif, censeur, directif, hérité du management de l’organisation bureaucratique.

La meilleure task force est celle dont le leader n’est pas trop autoritaire, ne décide pas à la place des membres de l’équipe, mais garde un flux de réflexion. Le leader ne doit surtout pas être l’expert incontournable du domaine mis à l’étude, ni avoir une position importante dans la hiérarchie, ce qui concourrait les équipes à lui faire allégeance. La bureaucratie maquillée en adhocratie reste la bureaucratie.

Des talents d’organisateur importent plus qu’une connaissance du problème étudié, comme : diriger de bonnes réunions, fixer des calendriers, garder les choses sur de bons rails, s’assurer que le travail est fait entre les réunions, obtenir la contribution de chacun des membres de l’équipe et pas seulement des participants les plus motivés. Mais les leaders n’ont pas toujours ces mérites, ou peut-être les oublient-ils dès qu’ils sont placés à la tête d’une task force.

Un bon leader doit être accessible, respecter son équipe, rendre le travail intéressant et communiquer au groupe du plaisir à travailler ensemble. L’adhocratie est un excellent terrain d’entrainement pour de futurs cadres dirigeants ayant quelques faiblesses relationnelles.

Trop de cuisiniers…

Il s’avère que les meilleures équipes sont composées de trois à sept membres à plein temps. Il peut être nécessaire de scinder les grosses équipes en plusieurs petites auxquelles on délègue des rôles différents. Leur composition doit refléter l’étendue, la nature et la complexité du problème.

Les membres d’une équipe ad hoc peut judicieusement représenter un panel transversal de l’entreprise à deux dimensions, associant « fonction » et niveau hiérarchique ».

Ce principe de la découpe diagonale est efficace pour deux raisons :

  • Les cadres dirigeants ne vivent pas tout à fait dans le même monde que leurs collaborateurs. Pourtant, ce sont eux qui mettent en œuvre les changements.

  • L’inverse est également vrai : aux niveaux inférieurs, les gens n’ont pas une bonne vision de ce qui se passe au-delà de leur environnement immédiat.

En plus du talent, l’adhocratie a besoin de ressources : de l’argent et du temps.

Concernant le temps consacré à la tâche, une attitude répandue veut que « seul ce qui se mesure est réalisé ». Les performances sont en général mesurées à des standards fixés pour des fonctions définies par le système bureaucratique. Il s’en suit que la contribution à des équipes ad hoc n’est ni récompensée, ni reconnue.

La plus grande part du travail des task forces se réalise entre les réunions. Les réunions ne doivent être qu’un moyen simple de faire respecter le calendrier et non être le théâtre de discussions animées donnant l’apparence d’un progrès des travaux sans véritables avancées.

Détachés à plein temps, les principaux membres de l’équipe délèguent généralement leurs responsabilités ou règlent leurs affaires courantes pendant « l’autre plein temps ».

Conscients que leur seul et unique travail est de faire avancer le projet, ils n’ont d’autre alternative que de faire avancer l’adhocratie en travaillant autant que nécessaire, jusqu’à un « double plein temps ».

Une task force typique pourrait se composer de la façon suivante :

  • Un parrain, de niveau hiérarchique important, qui consacre un à deux jours par mois à l’équipe, à suivre notamment l’avancement des travaux ;

  • Un comité d’orientation, nommé par le parrain, qui rappelle aux autres dirigeants qu’ils doivent s’intéresser au projet au moins une fois par trimestre ;

  • Un leader, qui consacre entre un tiers et la totalité de son temps au projet ;

  • Un noyau réduit de membres (2 à 7) dont toute l’énergie est dévolue au projet ;

  • Un nombre relativement élevé de participants à temps partiel, rattachés de façon formelle à l’équipe et qui doivent consacrer quelques heures par semaine au projet.

La composition de la task force, la durée des différentes missions ainsi que les modes opératoires, comme d’ailleurs l’idée même d’adhocratie, dépendent de la nature et de l’importance des problèmes que l’on souhaite aborder.

Hoshin

Submergés par les problèmes actuels de compétition globale, de dérégulation, d’instabilité monétaire, il est impossible de personnaliser et de concilier en plus des thèmes de travail aussi vastes que la qualité totale, le juste-à-temps, l’excellence, le changement, l’innovation, la compétitivité fondée sur le temps de réaction, l’esprit d’entreprise, la participation ; sans parler de la mise en œuvre au quotidien des actions nécessaires à leur intégration.

Les entreprises passent à côté de trop de choses en planifiant de façon trop rigide leurs actions. Elles doivent cibler quelques thèmes concrets, quelques opportunités et s’y tenir. Hewlett-Packard a baptisé cette démarche : hoshin (« direction » en japonais).

L’échec de la gestion de l’adhocratie s’explique par l’incapacité à concentrer ses ressources sur quelques objectifs, par un manque de la volonté à prendre des décisions difficiles ou à faire bouger les choses au moment où la task force est crée. En matière de management, il y a beaucoup plus d’options négatives que d’options positives.

Conseils pour démarrer

► Pour les dirigeants

  • Votre rôle est de créer l’environnement favorable à une méthodologie efficace de résolution de problèmes, d’être attentif, d’agir comme un coach, d’être disponible dès le premier jour du projet.

  • Faites correspondre l’étendue des activités de l’équipe avec votre propre champ de responsabilités. Si une implication plus vaste s’avère nécessaire, vous devez avoir le pouvoir d’impliquer le plus haut niveau de la direction.

  • Sélectionnez des leaders d’équipe prêts à s’impliquer et aidez-les à recruter leurs membres parmi les collaborateurs les plus prometteurs.

  • Faites en sorte que les ressources nécessaires soient effectivement allouées.

  • Apprenez comment contribuer efficacement à un projet : techniques de résolution de problèmes, de gestion de conflits, de qualité d’écoute, de confrontation efficace, de coaching, etc.

  • Ne démarrer pas un projet sans être convaincu de son importance. Confrontés à un manque de ressources, ciblez les projets les plus prometteurs.

► Pour les leaders d’équipes

  • Ne prenez la responsabilité d’une équipe que si la direction sera impliquée dès le premier jour et le restera.

  • Imaginez des moyens pour pour maintenir l’attention des dirigeants. Programmez des réunions d’information avec le responsable du projet et le comité d’orientation. Si l’implication de la hiérarchie baisse, demandez à ce que le projet soit abrégé ou réorienté.
  • Votre rôle comme celui d’éventuels autres leaders que vous seriez amenés à rencontrer est avant toute chose de faire en sorte que le travail avance, quelque soit la position hiérarchique de chacun.

  • Passez la plus grande partie de votre temps à écouter et à encourager les autres. Donnez suffisamment de directions pour assurer que l’équipe obtienne des résultats et reste dans les délais.

  • Négociez l’intégration dans votre équipe des collaborateurs les plus compétents et veillez à ce que sa composition couvre l’étendue des problèmes à traiter.
  • Obtenez de la direction des informations explicites sur les ressources, sans concession, dont pourra disposer l’équipe.

  • Ne vous engagez que sur des budgets, des délais et des objectifs que vous estimez réalistes.

► Pour les membres des équipes

  • Dès le départ, informez-vous pour comprendre le point de vue de la direction.

  • Regardez votre mission comme une opportunité unique d’apprendre, d’être confronté à des points de vue, des zones de l’entreprise, des gens, des compétences que vous n’auriez pas autrement eu l’occasion de rencontrer.

  • Assurez la pérennité de vos fonctions antérieures et impliquez-vous dans votre collaboration.

  • Discutez, défendez votre point de vue avec votre leader d’équipe.

3. Gérer

Le démarrage déterminera l’atmosphère et le climat du projet.
Le lancement du projet : faites-en un événement !

Tout effort ad hoc nécessite un lancement particulier. Les circonstances de l’annonce, son ton et les mesures proposées doivent correspondent au sujet et à la culture de l’entreprise, mais c’est bel et bien la phase de lancement qui doit faire passer la notion d’urgence et démontrer son importance.

Cette urgence détermine à son tour le sérieux avec lequel le projet sera pris en compte par des collaborateurs déjà fort occupés, ou au contraire traité comme la passade de la semaine qui ne demande qu’à être oubliée.

  • Un film vidéo : « Zenger Miller », entreprise de formation prestigieuse à San-José, en Californie, qui emploie 250 personnes réparties dans 18 bureaux à travers les États-Unis.
    L’entreprise qui vendait des stages sur le thème de la formation de qualité semblait incapable de trouver une solution à un taux cumulé d’erreurs de facturation et d’expédition, supérieur à 6 %.

    Face à ce problème d’ordre général, Jack Zenger, l’un des deux fondateurs, nomme pour son équipe ad hoc, deux parrains ayant « la surface nécessaire » pour le résoudre. La direction fait ensuite savoir à sa clientèle qu’elle est consciente du problème et qu’elle est déterminée à le résoudre. Huit membres représentatifs d’une fonction clé, suffisamment crédibles et efficaces formeront le noyau dur de l’équipe assurée par la direction qu’elle considère ce problème très important. Enfin, les deux parrains réalisent un film vidéo visionné à tous les collaborateurs de Zenger-Miller qui explique le problème, sa ténacité, son importance, ainsi que la mission confiée à l’équipe.

  • Un grand spectacle : « Raychem », entreprise fondée par Paul Cook en 1957, fabrique des matériaux « à mémoire ». L’entreprise compte 11.000 salariés et son chiffre d’affaires annuel est de plus d’un milliard de dollars.

    Paul Cook et Bob Halperin, ancien président du conseil d’administration, avaient le sentiment qu’ils devaient trouver un moyen de motiver les cadres, de faire accepter l’idée que les choses allaient devoir changer de façon radicale. Ils organisèrent un séminaire de planification stratégique. Soporifique à souhait, une mise en scène inattendue, très hollywoodienne comme savent faire les américains, a réveillé les consciences et transformé l’entreprise. Une flotte d’hélicoptères a interrompu le séminaire, arborant d’immenses panneaux floqués : IMAGINATION, INNOVATION, PRISE DE RISQUES. Les pilotes affublés d’uniformes de gardiens de prison, investirent la pièce et dirigèrent les participants éberlués vers les hélicoptères qui décollèrent aussitôt en direction de la côte. Là, des barges venant de l’océan accostèrent pour décharger une étonnante cargaison : un éléphanteau, une caravane de chameaux, et fermant la marche, un éléphant de taille imposante. Chaque animal portait un message : « courbe du chiffre d’affaire », « imagination », « pionniers technologiques »... « taux de croissance à atteindre ». Les habitudes de travail de Raychem avaient clairement vécu.

  • Un simple mémo : « Chevron » pour sa part démarre ses projets par un simple mémo d’une page qui dresse les grandes lignes de la mission de l’équipe, ses objectifs, la date de début des travaux, la composition de l’équipe, ses objectifs, les résultats espérés, et la date prévisionnelle de fin de mission.

    Pour des cadres rompus à la précision et à l’action, créer et gérer une task force peut nécessiter d’être briefés, de développer les compétences requises. Une « structure » aide à soulager appréhension et sentiment d’impuissance, à éviter de se jeter sur les solutions non raisonnées qui anime en général un groupe de travail, avant même d’avoir posé les problèmes, d’avoir rassemblé l’information ou d’avoir envisagé des alternatives. Un moyen efficace consiste à consigner par écrit, avec des mots, des phrases, des paramètres, le résultat parfait arrivé à terme.

Structurer l’inconnu

Ce que le responsable d’équipe ressent en général n’est pas très différent des impressions qu’éprouve un navigateur solitaire en pleine mer une nuit de tempête : il a une idée assez précise de l’endroit où il se trouve et de celui où il veut se rendre, mais aucune de ce qui l’attend en chemin, d’autant que ses carte ne sont pas vraiment fiables.

La plupart des procédures traditionnelles de management encensent la structure et la prévisibilité depuis les graphiques de Gantt jusqu’aux ramifications du chemin critique. À l’opposé de ces règles, le travail inopiné, imprévisible, non structuré d’une équipe ad hoc, est déstabilisant. Il faut raisonner comme s’il s’agissait d’une expérience scientifique, formuler des hypothèses, rassembler des faits, et recommencer jusqu’à ce que les réponses aux principales questions se dessinent. Une trop grande partie de ce qui arrive dans une phase n +1 dépend de ce qui a été mis à jour dans la phase n.
La difficulté consiste dès lors à donner un semblant d’organisation à ce qui est apparemment inconnu.

La solution consiste à fractionner le projet en séquences assimilables, à ne planifier que la première étape, à ne pas planifier les autres sauf de façon très lâche. Cela donne une structure de travail qui ne peut pas être planifiée en détail, ce qui gênerait en fait l’efficacité du projet.

• Zenger-Miller : l’hypothèse de départ était que le problème venait du département expédition mais les données réunies par les équipes chargées d’améliorer la qualité révélèrent que le problème concernait en fait toute l’entreprise, entrainant un changement de l’hypothèse initiale. Un travail méthodique et le pistage systématique des erreurs révéla que la source la plus importante du dysfonctionnement était causé par des erreurs clients ou des commerciaux. Le projet progressant, cette manière de gérer fut poursuivie.

Hypothèse. Collecte de données. Nouvelle hypothèse. Les professionnels formés aux programmes de qualité totale sont rompus à penser de cette façon.

• Une entreprise minière d’Australie : une demande accrue de charbon émanant de clients japonais a provoqué des excédents de trésorerie posant question.

  • hypothèse initiale : augmenter les stocks.

    La réponse aux diverses interrogations soulevées par cette hypothèse apprend que la forte demande japonaise n’était en définitive qu’une aberration ponctuelle – même si elle était récurrente – qui avait amélioré les profits de l’entreprise et sa trésorerie.

  • Nouvelle hypothèse : utiliser l’excédent de trésorerie pour améliorer le rendement des mines.

    De nouvelles collectes de données révèlent que les baisses de productivité avaient seulement deux sources : l’action syndicale et l’entretien des machines (continuous miners).

  • Hypothèse suivante : négocier avec les syndicats et améliorer la technologie des machines.
    Nouvelles données : la plupart des actions de grève émanaient de problèmes de sécurité liés à l’utilisation des machines.

  • Hypothèse finale : changer les conditions de travail et engager des améliorations technologiques. Porter de 15 % à 20 % le temps de travail des machines augmenterait la valeur nette d’une seule mine d’environ 100 millions de dollars.

• Une importante banque japonaise : la banque perd des parts de marché japonais de l’épargne.

  • Hypothèse de départ : ce recul est dû à un service clientèle défaillant.
    Deux pistes distinctes sont explorées. La première semble confirmer l’hypothèse initiale en incriminant le domaine du service lié à l’informatique. Le résultat de la seconde fut stupéfiant. La totalité des pertes de marché était imputable à la ville d’Osaka et plus précisément à certains types de succursales.

  • Nouvelles hypothèses : trouver ce qui différenciait ces succursales des autres.
    De nouvelles données permirent d’identifier ce qui semblait être le véritable problème. Cinq mois de travail ad hoc auront permis de combler pratiquement la totalité des pertes.

Dans un monde imparfait, vous ne pouvez jamais vraiment savoir où un chemin va vous entraîner. Testez vos hypothèses. Si elles se vérifient, avancer d’un pas, sinon prenez une autre orientation et recommencez. La discipline de base est toujours la même : hypothèse ; collecte de données ; nouvelle hypothèse. Bien sûr, ce type de travail prend un aspect plus confus, moins structuré et moins évidant que ce que ces témoignages laissent volontairement paraitre.

À quelle fréquence devez-vous vous arrêter et vérifier vos hypothèses ? Au rythme des réunions générales de l’entreprises, chaque matin… C’est selon, mais l’écoute sera très différente. Les réunions entre quatre yeux sont évidement la meilleure solution. Le recours à la technologie - conférence téléphonique, visioconférence ou courrier électronique - confère un échange peu convivial et difficilement créatif. Warren Bennis, The Temporrary Society, voit dans ce substitut, un lien entre technologie et l’a-synchronie (son terme pour désigner l’incapacité à être ensemble).

Pour Gary Steele, expert en management de projets, les hypothèses qu’il appelle « suppositions » ne fixent pas seulement des orientations, elles permettent également de déterminer certains paramètres critiques et constituent des passerelles entre différents langages. Des univers très différents nécessitent un langage commun. Gary Steele utilisait un système simple de drapeaux de couleur.

Un drapeau jaune signifie « je ne suis pas sûr d’avoir raison. Je n’ai pas assez étudié la question ; c’est seulement une intuition mais je le fais savoir parce que j’ai le sentiment qu’il y a un problème ; notre hypothèse n’est peut-être pas la bonne. »
Un drapeau rouge signifie « je tire le signal d’alarme. J’arrête le train au risque de faire tomber les passagers. Il y a un vrai problème. Je suis certain que l’une des hypothèses est fausse et je pense que c’est suffisamment sérieux pour prendre la décision de tirer le signal d’alarme. »

Le système de Seele fondé sur des suppositions et des drapeaux de couleurs est un moyen comme un autre de progresser à travers un territoire inconnu. Mais comme il dit : « vous économisez une fortune si ce système est assimilé et utilisé effectivement par chacun. »

Information : les faits de la vie

Généralement bloquées par leur manque d’imagination, les équipes consacrent les premières phases d’un projet à collecter des données (interviews) à rassembler, à analyser, et à tester des faits.

La majorité des interviews se réalise en interne. Simple, forte et moins commune, la pratique extensive des interviews externes est peut-être plus efficace, inutile de réinventer la roue. Xerox appelait ce regard externe « benchmarketting », IBM « best of bread » et Ford « best of class ».

  • Ford : Pour concurrencer une catégorie type du marché de l’automobile, l’équipe identifia une douzaine de modèles comparables, les désossa – intellectuellement et physiquement – et retint 400 éléments à égaler voire à dépasser avec leur nouveau modèle Ford Taurus.

  • Intel Corp. : Son plan de lutte contre l’absentéisme s’est inspiré entre-autre de Gallo wine qui obtenait d’excellents résultats avec moitié moins de personnel.

    Une équipe d’exploration minière en Australie : En lisant attentivement les journaux de route d’anciennes explorations, l’un des membres de l’équipe repère « une description de falaise au nord de Queensland laissant supposer qu’on pourrait y trouver du bauxite ». Intrigué, il convainquit l’équipe de s’y rendre et permit ainsi une découverte majeure de ce minerai.

  • Children’s Television Workshop : En projetant parallèlement des séquences d’émission et des diapositives gênant considérablement la concentration à un public d’enfants de 3-4 ans, si les enfants accordaient plus d’attention aux diapositives qu’à l’écran, l’équipe savait que la séquence n’était pas bonne.

Les moyens d’obtenir des informations ne devraient être limités que par l’imagination des membres de l’équipe. Les bureaucraties éliminent les expérimentations parce que ces dernières impliquent des erreurs et que, dans les bureaucraties, les erreurs sont sanctionnées. Mais sur des terrains moins policés, la seule chose à faire est de tremper un pied dans l’eau pour estimer la température.

Bien que toute décision de management les associe, il convient de différencier les faits d’un contenu subjectif. La plupart des équipes préfère argumenter plutôt que collecter des faits et des données. Un jugement de valeur n’est pas une information, une information n’est pas une donnée. Nous vivons dans une société riche en données (chiffres, nouvelles inédites, etc.) mais pauvre en information.

L’information et la compréhension viennent de comparaisons forcées. Richard Saul Wurman, Information Anxiety, cite cet exemple : « Dire qu’une acre vaut 6 272 640 pouces carrés est un fait avéré mais dire qu’une acre a environ la taille d’un terrain de football américain sans les zones de but est beaucoup plus parlant bien qu’approximatif. »
Gardez à l’esprit que les hypothèses (ou suppositions) facilitent les comparaisons et balisent vos progrès.

Déclarer la guerre au problème

Dès que possible, les signes extérieurs de l’adhocratie doivent refléter son urgence. L’un des moyens consiste à aménager un Q.G., un espace réservé au projet (bureaux + téléphones) qui force les membres à communiquer entre eux - le simple fait de décider ensemble des dates de réunions et de les faire noter par chacun dans son agenda, symbolise l’importance du projet - où les équipes peuvent rassembler documents et matériel (ordinateurs, dossiers), où les murs peuvent être recouverts d’idées, de plannings, de graphiques… de dessins humoristiques.

La symbolique de ce Q.G. fait monter le degré d’implication de chacun ; elle dit aux membres de l’équipe : « ceci est votre boulot prioritaire pour le moment » et au reste de l’entreprise : « ce travail est une priorité ; nous lui avons alloué son espace propre. »
D’autres circonstances peuvent renforcer le sentiment d’importance du projet. Un séminaire d’entreprise, par son programme et son lieu rendant impossible tout évitement, toute distraction, stigmatise l’esprit et symbolise une direction nouvelle, différente.

L’adhocratie efficace

« Pour le difficile, ce sera fait tout de suite, pour l’impossible, il nous faut un peu plus de temps. »

Idées fortes impliquant de repenser le système et objectifs à priori impossibles à atteindre font naitre un esprit d’aventure qui attire les meilleurs collaborateurs en leur faisant oublier leurs clivages traditionnels pour s’unir dans l’effort. L’esprit du projet plutôt que les cases de l’organigramme devient le principe organisateur.

  • Hewlett-Packard

    John Young, son directeur général annonçait chaque année un objectif « grandiose » comme par exemple réduire de plus de la moitié le temps de développement d’une imprimante. Il est ainsi passé de 54 mois à 22 mois.

  • General Electric

    Menacé par la concurrence, son département « coupe-circuit » somnolait. L’équipe a revu entièrement le processus de fabrication et réduit de trois semaines à trois jours le délai moyen entre la commande et la livraison.

  • Bridge Housing Corp., une association au 125ème rang des constructeurs de maisons avec près de 5.000 maisons construites.

    En construisant dans des endroits à la règlementation draconienne en matière d’extension et de protection de l’environnement, 104 maisons à Pacifica, là où les autres constructeurs avaient échoué puis en construisant une mini ville nouvelle à Marin City, un projet de 100 millions de dollars sur 25 hectares comprenant 326 nouvelles maisons, 60.000 m² de commerce, un parking, un plan d’eau, des bâtiments administratifs, une nouvelle église et un nouvel échangeur d’autoroute, Bridge illustre parfaitement toute la puissance, le drame, l’aventure et l’excitation qui existent lorsque l’adhocratie fonctionne à son meilleur.

Conseils pour rester sur les bons rails

L’adhocratie doit être gérée aussi attentivement que la bureaucratie.

► Pour les dirigeants

  • Fixez dès le premier jour, l’esprit dans lequel vous souhaitez que se déroule le projet. Réunissez toute l’équipe dans un endroit particulier. Soyez présents, faites des apparitions ici et là tout en gardant une certaine distance. Veillez à alterner périodes de travail et de détente.

  • Exiger une approche rigoureuse. Formez vos collaborateurs aux techniques de développement d’hypothèses/collecte d’informations.

  • Utilisez des symboles (agenda, Q.G.) et des lieux de réunions réguliers ou particuliers qui rappellent l’importance du projet.

  • Rendez le travail excitant, mettez-y un peu d’aventure, lancez des défis.

► Pour les responsables d’équipes et leurs membres

  • Travaillez à partir d’hypothèses ou suppositions ouvertes à la dissension.

  • Les réunions périodiques doivent suivre le schéma : hypothèse de départ, analyse et synthèse, nouvelles hypothèses.

  • Un projet peut être effrayant ou euphorisant. Clarifiez les hypothèses en rassemblant des faits, en expérimentant, en tirant éventuellement le signal d’alarme.

  • Encouragez les approches imaginatives sachant que chacun a le droit à l’erreur.

  • Soyez rigoureux, explicite et créatif (approches ingénieuses, comparaisons imaginatives).

4. Obtenir des résultats

L’objectif d’une adhocratie bien maitrisée est de mettre en œuvre le changement.

Aller jusqu’au bout de la démarche

Habitués à penser séquentiellement, nous considérons logiquement la mise en œuvre comme la dernière étape de la procédure, souvent déléguée à quelqu’un d’autre. Mais les membres des équipes ad hoc ne peuvent pas transmettre à ceux qui n’ont pas été impliqués leur compréhension du problème, leur enthousiasme pour faire jaillir une solution. Les gens sont tout simplement plus attentifs et concrets lorsqu’ils savent que ce sont eux qui devront vivre avec les conséquences de leurs recommandations.

  • Hewlett-Packard

    D’un excellent rapport instruit par la meilleure des équipes, avec des analyses solides, des recommandations claires et essentielles, rien n’en sortit. La mise en œuvre déléguée à d’autres personnes, sans aucun doute capables mais pas impliquées, a été perçue comme un simple boulot supplémentaire qui s’est finalement traduit par une parodie de mise en œuvre.

  • Chevron

    Bien qu’elles soumettent un rapport brillant, les grandes équipes de consultants n’obtiennent pas de bons résultats car il ne s’agit jamais d’une réalité à laquelle elles vont être confrontées.

Lee Mc Graw, ex-directeur financier, a confié une mission à une équipe interne, parce que « le type qui doit piloter ce boulot sera celui qui devra faire fonctionner le système lorsqu’il aura été conçu. »

« C’est mon enfant »

Les gens aiment leurs enfants, leurs idées et sont sensibles aux procédures qu’elles influencent, les enfants des autres ne sont que des enfants.

  • Ford

    Pas impliquée dans la conception d’un nouveau modèle, la production, indifférente à son succès ou à son échec, sabotait les « bébés » des designers.

    Ford Fiesta : en Allemagne, les tensions entre les concepteurs et la production étaient telles que les ingénieurs n’étaient tout simplement pas admis dans les usines de montage. Lewis Veraldi, ingénieur design et leader du projet Fiesta qui fut un succès, associa les responsables de production au processus de conception en leur demandant : « Comment pouvons-nous concevoir ce nouveau modèle pour vous faciliter la vie ? »

    Ford Taurus : un pari audacieux de la direction permit de créer une atmosphère héroïque et excitante. Donald Petersen, Président, exhortait l’équipe à créer la voiture dont chacun serait fier de conduire. Conception et production avançaient ensemble, associant l’assemblage, le marketing et le département révision/réparation. Auparavant, la construction séquentielle faisait de chaque étape « un mur », de sorte qu’en fin de procédure il était trop tard pour réagir.

On pourrait croire qu’une participation très large à des projets dès le premier jour conduit à rallonger les délais et à augmenter les coûts à cause de la confusion potentielle et du redoublement des activités. Il n’en est rien et cette approche est redoutablement efficace :

  • les projets sont plus novateurs,

  • ils diminuent les coûts/temps de développement de produit,

  • ils valorisent le processus de mise en œuvre perçu à tort comme un « boulot de tâcheron » qui doit être fait par « les autres »,

  • chaque projet devient l’enfant de chacun ; tout le monde a l’opportunité d’y participer et de soulever des objections.

Le changement est toujours une menace. En entrainant la modification du comportement, la mise en œuvre porte une très forte charge d’émotivité. On change davantage notre comportement pour des raisons subjectives que pour des raisons objectives. Les procédures, en faisant appel à nos émotions, sollicitent notre apport personnel et prennent nos suggestions au sérieux.

Le meilleur de deux mondes

Les entreprises de demain les plus performantes seront à la fois bureaucratiques et adhocratiques. L’adhocratie doit donc être organisée pour fonctionner en tandem avec la bureaucratie.

Un projet intense et long peut donner aux cadres un sentiment d’enthousiasme, mais susciter également une certaine peur de l’inconnu et leur faire perdre leurs repères bureaucratiques. Ces spécialistes doivent veiller à garder le contact avec l’autre monde pour rester au meilleur niveau de leurs prestations dans le cadre des équipes et en dehors.
L’importance d’une liaison, d’une complémentarité entre adhocratie et bureaucratie peut se matérialiser par un grand camembert, avec un cercle intérieur, le noyau dur de l’équipe ad hoc et un cercle extérieur rassemblant tous les éléments de la bureaucratie associés au programme.

À l’intérieur de ce cercle extérieur, liés entre eux et au noyau central, on représente :

  1. des hexagones symbolisant les personnes totalement mobilisées sur le projet,

  2. des cercles symbolisant les gens et les unités de travail ayant un rôle précis en lien avec l’équipe,

  3. des carrés symbolisant les comités d’orientation.

Parmi ces personnes, certaines peuvent être impliquées à temps plein tandis que d’autres se cantonnent à leurs divers rôles fonctionnels, ne faisant qu’assister le programme, et d’autres encore n’ont que des responsabilités ponctuelles ou à temps partiel.

Pour faire travailler ensemble bureaucratie et adhocratie, il faut gagner le soutien de la bureaucratie sans toutefois se laisser piéger dans la procédure habituelle de prise de décision bureaucratique, et accepter l’expression d’opinions minoritaires. Un effort ad hoc peut vraiment changer la bureaucratie.

Surveillez le compteur

Pour garder le cap et finaliser de nouvelles formes d’organisation, la gestion de l’adhocratie requière :

  1. de poser des balises (chaque fin d’étape), donc de mettre en avant les objectifs majeurs du projet et en définir ce qui doit être mesuré en tronçonnant arbitrairement le projet en morceaux digestes.

  2. de mesurer les résultats, donc d’adopter un système de mesure, le découpage du projet pouvant prendre la forme d’un planning d’événements clés, avec les échéances en abscisses, les fonctions (ou départements) en ordonnées et les événements clés aux intersections avec un responsable fonctionnel identifié.

  3. d’assurer le suivi, c’est-à-dire de surveiller le compteur, d’informer le comité d’organisation à chaque fin d’étape atteinte des objectifs et dépenses prévus/réalisés, de présenter l’élément suivant (objectifs, coûts).

Conseils pour obtenir de bons résultats

Difficile, la mise en œuvre doit être digne et paraitre cruciale.

► Pour les dirigeants

  • Dépouillez vos rapports qui doivent être une synthèse et non une analyse.

  • Créez un système de gestion bureaucratie/adhocratie pertinent prévoyant une mise en œuvre ni séparée, ni séquentielle.

  • Veillez à ce que les équipes utilisent une méthode de mesure des progrès et de
    rectification des éventuels ratés.

► Pour les responsables d’équipe

  • Informez la structure traditionnelle dès le lancement du projet. Une bureaucratie hostile est un suicide politique.

  • Admettez et évitez que les membres de l’équipe s’écartent plus qu’il ne faudrait de la bureaucratie.

  • Demandez à l’équipe d’utiliser des balises et de soumettre régulièrement des rapports, ce qui permettra de mesurer leurs performances.

► Pour les membres de l’équipe

  • Prévoyez tout de suite la mise en œuvre en impliquant la bureaucratie et en identifiant les éventuels foyers de résistance émotionnelle.

  • Informez la hiérarchie du retour perçu par la bureaucratie.

5. Créer le bon environnement

Le travail structuré chasse celui qui ne l’est pas. Cette loi de la nature s’assortit d’opportunités ratées, de problèmes insolubles, d’initiatives neutralisées.

Non structurée, l’adhocratie ne peut s’exprimer que dans un environnement, un contexte qui décourage les excès bureaucratiques et utilise les rouages administratifs pour structurer les efforts de l’équipe. Cela commence par des déclarations explicites - et une compréhension implicite - des valeurs auxquelles croit l’entreprise.

Un dessein plus élevé

• AES, entreprise de production d’énergie bon marché, fondée en 1982 par Roger Sant et Dennis Bakke.

Chaque usine d’AES produit 100 mégawatts, soit l’énergie électrique suffisante pour les besoins d’une ville de 100.000 habitants pendant un an.

AES a été construit sur quatre valeurs essentielles qui guident toutes les activités de l’entreprise :

  1. Intégrité : être honnête et fiable envers les clients et les collaborateurs.

  2. Loyauté : agir avec respect, dignité et loyauté envers les clients et les collaborateurs, être fidèle à une cause et non à une fonction.

  3. Bénéfice social : impacter positivement la société en abaissant les prix de vente, en améliorant la qualité du produit, en créant des emplois et en préservant l’environnement.

  4. Plaisir : maintenir un travail gratifiant et excitant, ignorer le superficiel pour se concentrer sur l’essentiel.

Ces valeurs favorisent un contexte d’entente entre bureaucratie et adhocratie. AES a su déjouer les pièges du labyrinthe des vieilles bureaucraties administratives et des réglementations.

Sans confiance, pas de travail d’équipe

Dans les entreprises se développent majoritairement une panoplie sophistiquée de comportements, plans de carrière et intrigues politiques qui attisent la compétition. Il est possible d’éradiquer cette « danse du scalp » en construisant un système commun de valeurs, une autre culture basée sur la confiance, l’intégrité, l’éthique et la moralité.

« Apprendre, agir, apprendre, agir », le changement rapide et son corollaire, le besoin de garder ouvertes plusieurs options rend également difficile le maintien de la confiance qu’exige pourtant l’adhocratie.

Pour éradiquer ce manque de confiance qui entrave le développement, la seule solution consiste à créer un environnement où les collaborateurs se respectent mutuellement et ont confiance les uns envers les autres.

Nous/Eux

L’obstacle à la coexistence sereine de l’adhocratie avec la bureaucratie, c’est l’opposition « nous contre eux », mais aussi les vieilles habitudes du passé, les mythes et les aprioris. Chacun doit pouvoir remettre en question l’existant quitte à réduire la bureaucratie et la hiérarchie.

Comment la superficialité brise la confiance

Créer le bon contexte signifie également déclarer une guerre de tous les instants à la bureaucratie irraisonnée.

Le parasitage bureaucratique étouffe l’adhocratie qui pourrait faire intervenir le changement. La solution la plus simple consiste à faire réfléchir les salariés sur le caractère important ou superficiel des mesures qu’ils décrètent ou qu’ils suivent afin de déraciner la bureaucratie inutile et rendre le travail plus stimulant, plus agréable.

• Dans une entreprise de l’alimentaire, les cadres étaient payés selon un système récompensant la taille de leur « zone de pouvoir ». Leurs niveaux de salaire et de primes dépendaient donc de leur position dans la bureaucratie. Dès qu’étaient prononcé les mots « équipe de projet », ils entendaient « perte d’influence, diminution de salaire, absence de primes ».

• Natural Language Inc., une petite entreprise de conception de logiciels.
Il y a un penchant naturel à ajouter des structures inutiles, dès les niveaux les plus superficiels comme une procédure de remboursement de notes de frais, conçue pour satisfaire ceux qui en ont la charge, plutôt que ceux qui les utilisent.

Ce que la stratégie ne peut pas faire

S’il est évident que l’adhocratie ne peut pas fonctionner dans un vide stratégique elle peut, en revanche, s’avérer être un bon outil pou préciser une vision stratégique.

• Hewlett-Packard

Conseils, comités, task forces et projets avaient asphyxié l’entreprise au point de créer plus de problèmes que d’en résoudre et que plus personne ne pouvait plus prendre de décisions. L’organisation ad hoc avait pris la place d’une bonne et simple société.
Il manquait une stratégie simple pour fixer les directions à suivre car les plans trop compliqués ne fonctionnent jamais.

Si la meilleure stratégie est toujours en devenir, elle combine toutefois deux éléments essentiels :

  1. Une description générale cohérente de la direction à suivre et une compréhension profonde du métier de l’entreprise.

  2. Une définition précise de la forme d’organisation permettant de saisir rapidement les opportunités du marché.


Une stratégie n’est pas un plan arrêté, elle doit laisser la possibilité d’identifier quelques problèmes clés chaque années et de se concentrer sur eux, de former une équipe pour les transformer en opportunités.

Une approche ad hoc se doit d’aider à développer une stratégie, une vision.

L’effet pygmalion

Convaincu que son équipe pouvait réaliser l’impossible, la phrase favorite de Bob Swanson, fondateur de Genentech, était « Faites-le exister ! ».

Une attitude volontariste aide la cause du changement et particulièrement celle des équipes de projet. L’adhocratie fonctionne là où l’on espère la voir fonctionner. On peut toujours changer notre comportement, c’est là tout le pouvoir d’une véritable volonté d’aboutir et de réussir, ce que l’on appelle l’effet pygmalion.

Conseils pour créer le bon contexte

L’adhocratie ne peut prospérer que dans un contexte favorable.

► Pour les dirigeants

Faites de la place à l’adhocratie. Asséchez autant que possible la structure bureaucratique. Permettez la suggestion et la contradiction.

  • Combattez les attitudes Nous/Eux héritées des anciens modes de gestion.

  • Valorisez la confiance, l’intégrité, la moralité et l’éthique. Écartez les irrespectueux de ces valeurs. Autorisez la contestation face à votre possible attitude qui serait contraire à l’éthique. Considérez les possibles erreurs comme un investissement en formation.

  • Gardez présentes à l’esprit la stratégie et la vision.

► Pour les leaders d’équipes et leurs membres

Repérez les structures inutilement bureaucratiques et faites changer les choses.

  • Participer à une équipe où la confiance n’existe pas est le test le plus difficile de votre loyauté envers l’entreprise comme envers vous-même.

  • Faire partie d’un projet doit être considéré come une opportunité d’apprentissage et d’amélioration.

________________________________________

■ POSTFACE

Plus une entreprise est en bonne santé et profitable, mieux elle peut remplir son rôle social qui est de proposer des produits ou des services, de fournir des emplois, d’améliorer la qualité de la vie. C’est le principe du capitalisme dont le revers de la médaille s’appelle, selon l’économiste Joseph Schumpeter, « destruction créative » : l’apte survit, et le plus récent chasse l’ancien.

Avec le changement, les entreprises sont de plus en plus destructrices et moins créatrices. Nous abordons le changement avec l’outil qui y résiste le plus : la bureaucratie. L’œil rivé sur le résultat, nous n’investissons pas dans le changement. Nous sommes paresseux et sans imagination.

L’adhocratie, en tandem avec la bureaucratie, reste le meilleur moyen de gérer sans heurt le changement. Nous avons besoin d’une nouvelle théorie du management et d’expérience pour codifier cette proposition. Les idées présentées ici peuvent peut-être constituer de bonnes bases de réflexion.


III BIBLIOGRAPHIE

▲ III-2. BIBLIOGRAPHIE : LA PROGRAMMATION RATIONNELLE
► III-3. BIBLIOGRAPHIE : LA STRATÉGIE DES ÉQUIPES AD HOC
▼ III-4. BIBLIOGRAPHIE : LA POULPE ATTITUDE

Envoyer le billet « III-3. BIBLIOGRAPHIE : LA STRATÉGIE DES ÉQUIPES AD OC » dans le blog Viadeo Envoyer le billet « III-3. BIBLIOGRAPHIE : LA STRATÉGIE DES ÉQUIPES AD OC » dans le blog Twitter Envoyer le billet « III-3. BIBLIOGRAPHIE : LA STRATÉGIE DES ÉQUIPES AD OC » dans le blog Google Envoyer le billet « III-3. BIBLIOGRAPHIE : LA STRATÉGIE DES ÉQUIPES AD OC » dans le blog Facebook Envoyer le billet « III-3. BIBLIOGRAPHIE : LA STRATÉGIE DES ÉQUIPES AD OC » dans le blog Digg Envoyer le billet « III-3. BIBLIOGRAPHIE : LA STRATÉGIE DES ÉQUIPES AD OC » dans le blog Delicious Envoyer le billet « III-3. BIBLIOGRAPHIE : LA STRATÉGIE DES ÉQUIPES AD OC » dans le blog MySpace Envoyer le billet « III-3. BIBLIOGRAPHIE : LA STRATÉGIE DES ÉQUIPES AD OC » dans le blog Yahoo

Mis à jour 24/02/2024 à 05h04 par APL-AML

Catégories
■ APL-AML , III- BIBLIOGRAPHIE , ■ MÉTHODOLOGIES