@Dabou Master : moi aussi j'achète des jeux entre 5 et 15 € en général. Les petits jeux indépendants, y'en a plein qui sortent et qui sont bien, faut juste trouver chaussure à son pied. Et pour ça, vive les démos {^_^}. Mais ne te sens pas coupable à écrire des longs posts : si le contenu y est, ça paye sur le long terme (en tant que fervent créateur de pavés, c'est mon impression).
Primo, si le jeu ne convient pas on ne l'achète pas... sauf que justement tu ne peux pas savoir s'il te convient sans y avoir joué avant, ce qui implique généralement de l'acheter. Seul le cas de la démo jouable permet effectivement de se faire une idée de manière légale avant de payer, et il y a des arguments dans ce sens, mais ce n'est pas une pratique suffisamment répandue.
Secundo, plusieurs ont déjà souligner que la comparaison avec du matériel physique est caduque, mais sans vraiment entrer dans le détail, dans le sens où on reste sur des comparaisons (et certains diront que comparaison n'est pas raison, ce à quoi j'adhèrerais {^_°}). AoCannaille a commencé à entrer dans le détail, je vais donc essayer de compléter en essayant de donner une base commune et fiable, qui est celle de la loi.
Pirater un jeu n'est pas du vol (
code pénal, article 311) mais de la contrefaçon (
code de la propriété intellectuelle, article L335-2). L'argument du vol revient souvent dans plusieurs domaines (j'ai l'habitude du fansub, mais je viens d'avoir il y a quelques minutes le même argument vis à vis d'un article scientifique qui serait plagié : on te vole ton idée, on te vole ton travail, etc.) mais cet argument amène à une interprétation fallacieuse : un vol implique qu'on te soustrait l'objet du vol (tu l'avais, mais tu ne l'as plus), ce qui est évidemment complètement faux ici (les éditeurs ont toujours leur jeu ou leur vidéo, le scientifique a toujours son idée, etc.) et donc n'a pas d'effet bloquant ou perte que le vol implique. EyZox tombe d'ailleurs à pieds joints dans ces comparaisons fallacieuses :
C'est typiquement le genre d'exemples incomparables, car là c'est du vol (à part le coiffeur, qui est une
exploitation d'une personne réduite en esclavage). Ce qu'on te vole, tu ne peux plus le vendre, c'est donc une perte sèche pour le distributeur. Si l'objet est copié, tu ne "perds" rien, tout au plus tu peux calculer ce que tu "aurais pu" gagner si tous les pirates avaient payé pour ton jeu, sans pour autant garantir que tu l'aurais forcément gagné si le piratage n'avait pas lieu. C'est en cela que la contrefaçon est beaucoup moins une atteinte que le vol, même si ça reste une atteinte et il est donc normal que ce soit puni par la loi. Ceux qui sortent l'argument du vol jouent donc sur une aggravation de ce sentiment d'atteinte en faisant passer ce genre d'acte pour ce que ça n'est pas.
À cela on pourra me répondre que le vol et la contrefaçon ont tous deux 3 ans d'emprisonnement, mais le vol n'a que 45 000 € d'amende là où la contrefaçon en a 300 000 € (peines de base pouvant être augmentée si par exemple c'est fait en groupe), ce qui montre que c'est plus grave encore. Et à cela je répondrais que le délit de vol est la soustraction du bien à autrui, autrement dit le simple fait de prendre possession du bien d'une autre personne, à contrario du délit de contrefaçon qui concerne l'édition de choses, et non leur simple prise de possession.
Si je ne me trompe pas, l'édition est l'action de "
fabriquer ou de faire fabriquer en nombre des exemplaires de l'oeuvre ou de la réaliser ou faire réaliser sous une forme numérique, à charge pour elle d'en assurer la publication et la diffusion.". On est donc bien sur une perspective de distribution, et non de simple possession. Ce simple caractère distributif justifie qu'on écope d'une peine financière plus large, pour la simple raison qu'on met en jeu de multiples personnes contre une seule pour le vol.
D'ailleurs il me semble, à confirmer, que les actes qu'on qualifie de piratage ne sont pas illégaux de fait, mais acquière ce statut parce que le contrat initial (contrat de licence du jeu) interdit ces actes. Le contrat étant rompu, cela implique dédommagement tel que définit dans le contrat ou la loi. Notamment, le fait de trifouiller un binaire ou son code et de le redistribuer modifié est parfaitement légal dans la programmation libre (pas dans tout les cas d'Open Source), c'est d'ailleurs son but, ce qui ne serait pas faisable si un tel acte était globalement considéré comme illégal. Donc si on se donne le droit, au niveau de la loi, de modifier un produit comme on l'entend tant que cela reste privé, il ne reste alors qu'un argument purement contractuel pour critiquer l'unique fait de pirater une œuvre. Le délit de contrefaçon n'est pas sur le pirate, mais sur celui qui distribue ou participe à la distribution de l’œuvre piratée (seedeurs torrents, vous êtes concernés {^_°}).
Donc comme Dabou Master le mentionne, de manière générale c'est une bataille de gamin dans le sens où c'est à qui aura le dernier mot, que ce soit à tort ou à raison. Il y a clairement eu abus (d'un point de vue moral, pas forcément légal) des éditeurs légaux, et cela se voit par les changements de paradigmes actuels, que ce soit le mouvement libre pour le code source ou la VoD gratuite dans le domaine de la cinématographie. Les forces sont en train de s'équilibrer du fait de ces mouvements (donc bonne nouvelle Dabou, les choses évoluent), mais les lois les condamnant existent déjà. Il est ensuite du devoir (moral) de chacun de faire passer l'info pour mieux comprendre le problème, de façon à pouvoir faire la différence entre ce qui est de l'ordre de l'illégal, et donc utilisable comme argument, ou du système de valeur individuel, et donc rien de plus qu'une opinion. J'espère que mon speech va dans ce sens.
Donc à la question :
Non, le vol survient lorsqu'il y a substitution de propriété, ce qui est le cas pour le matériel physique, mais pas pour le matériel virtuel (copiable) ni le service. D'ailleurs tu mets en avant le refus de payer, pas la prise de possession, donc ça rend la réponse encore plus discutable car on touche là aux codes liés au commerce, et non plus à la propriété intellectuelle ni au code pénal.
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