Oui et Arendt est une disciple de Heidegger (et l'une de ses détractrices) et donc de Nietzsche. Forcément, nous retrouvons donc cette forme de "domination" dans le désir et l'expression du pouvoir.
J'ai beaucoup aimé ta phrase :
Pour Nietzsche par exemple, l'instinct de survie n'est que l'expression de ce qu'il appelle le désir d'extension du Moi. La première chose que veut l'Homme c'est étendre sa conscience autour de lui et non pas survivre (c'est d'ailleurs ainsi par l'existence d'un alter ego qu'il prend conscience de lui même et souhaite vivre. Il est facile de faire une analogie avec de simples microbes : leur désir de survie est bien inférieur au désir d'extension purement biologique). Les travaux de Arendt tendent à démontrer qu'il y aurait une confusion entre l'existence du "Moi" instinctif et notre instinct de survie. Par extension du Moi, nous n'entendons pas écraser son voisin par la force, mais un rapport bien plus subtile qui peut tout aussi bien être un désir de transmission de savoir, un sentiment amoureux, d'amitié, de peur, de souffrance etc. L'interprétation de ce cas particulier (celui de Eichmann) devient parfaitement logique. Il ne semble pas illogique qu'un individu affublé de folie soit en réalité parfaitement logique dans sa vision du monde et pire encore puisse parfaitement en arriver à mettre fin à sa propre vie car il n'arrive pas à exprimer ce désir d'extension. Pour moi, l'approche naturaliste de la philosophie, permet de montrer qu'en réalité il existe des phénomènes fondamentaux qui sont "au dessus" (improprement) de l'instinct. (Pour relier ça à la biologie, il existe les théories sur la néoténie qui indique que l'être humain naît de manière prématurée ce qui lui assure une plus grande adaptabilité et une plus grande souplesse évolutive. Il ressent alors un besoin de communication pour évoluer pleinement. Cette hypothèse biologique rejoint l'hypothèse du désir du Moi à s'étendre. Je trouve d'ailleurs peu de travaux qui mêlent ces visions biologiques et des idées philosophiques. De même je parlais de bactéries tout à l'heure, mais l'ensemble du vivant semble suivre cette règle plus importante que la survie : l'extension. Darwin a négligé cette hypothèse malheureusement)Car dans les travaux de Arendt, en particulier sur le cas Eichmann, on se rend compte que les personnes qui ont effectué les pires atrocités ne regrettent rien. Ils ont été "câblés", et ce "câblage" constitue leur réel à eux, leur épistémè individuel, leur monde; et s'ils acceptent de s'être trompé, alors tout s'écroule, ce qui en terme darwinien de survie, est impossible pour un organisme vivant.
Donc oui, les mécanismes de la peur s'appliquent à toutes les strates de la société. C'est un problème philosophique et pas simplement politique. Je partage totalement ta conclusion. C'est pour cette raison que j'indiquais justement que l'origine et les causes ne peuvent pas s'arrêter à un simple business; il est nécessaire pour en comprendre les rouages, de comprendre le développement de la conscience de l'Homme et pourquoi il use de cette peur pour acquérir le pouvoir. Tant qu'on ne s'interroge pas sur ces questions, ce n'est que de la logique simple qui saute de conséquences en conséquences. D'ailleurs c'est ce que le reportage de France 2 m'a laissé comme goût.
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