C'est loin d'être aussi simple. Le fait que l'on ait pas trouvé de jurisprudence ne signifie pas qu'il n'en existe pas. Ne travaillant pas dans le droit, j'utilise des méthodes de recherche assez basique (Google en gros) et je suppose que c'est déjà plus que ne l'ont fait mes DP à l'époque.
En l'occurrence, ce n'est pas le délit de "prêt illicite de main d’œuvre" qui est en cause ici (pour lequel on trouve d'ailleurs des jurisprudences à la pelle et très souvent en faveur du salarié). Il s'agit plutôt de savoir ce qui définit le "lieu habituel de travail", notamment tel qu'il est cité dans l'article L3121-4.
Après, les SSII ne sont pas les seules concernées par le prêt illicite de main d’œuvre, les sociétés de ménage, de gardiennage, de maçonnerie (dans lesquelles la main d’œuvre prêtée provient parfois d'Europe de l'Est)... et la liste est longue.
Ce qui est étrange dans le cas des SSII, c'est qu'il s'agit de sociétés dont le métier en réalité est la réalisation de logiciels, c'est-à-dire un produit, et qui le vendent au client comme s'il s'agissait d'un service. Au final, le bureau d'étude et la réalisation est déportée chez le client, gérée par le client, et la SSII perd toute sa valeur ajouté pour ne devenir qu'une simple société d’intérim. C'est un mode de fonctionnement qui est aujourd'hui entré dans les mœurs et qui pourtant est très étrange.
C'est comme si une entreprise qui souhaite obtenir un véhicule particulier (par exemple, une remorque pour transporter des morceaux de carlingue d'A380) faisait appel à une société prestataire pour le concevoir, mais au lieu que la société prestataire s'en charge dans son bureau d'étude, elle fournirait simplement au client des ingénieurs spécialisés en remorque de camion.
Au final, avec ce système tout le monde est perdant. Le client y perd car il se retrouve avec des produits de qualité médiocre (ce n'est pas son métier de faire des logiciels et souvent ça se ressent), sans gagner en compétences puisque celles-ci sont acquises par des prestataires qui n'ont pas vocation à rester longtemps. Et la SSII y perd aussi car elle ne capitalise pas sur les projets de ses clients ou sur le savoir-faire de ses salariés. C'est financièrement rentable, mais c'est loin d'être pérenne.
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